LLCA – Renforcer le corps et l’esprit (4/4 )

Lutter contre ses mauvais penchants est un travail complet, qui engage presque toutes nos activités. Le plus souvent, on s’attarde sur les difficultés, bien réelles, du sevrage ou de la réadaptation. Mais pour s’attaquer à ses tâches, sinon herculéennes, au moins très difficiles, et qui feront aussi de vous un héros, il convient également d’augmenter notre énergie pour avoir assez de forces à mettre à disposition de nos travaux.

Trois axes vont considérablement nous aider: l’activité physique, les relations avec les autres, et les pensées et émotions positives.

L’activité physique

Dans tous les cas, l’activité physique est bénéfique. Il ne s’agit pas forcément de faire du sport. Ni même de forcer. Il s’agit de s’aérer et de bouger son corps. Deux à trois fois par semaine constitue un bon rythme. Une marche de trois-quart d’heures, une heure, une séance de gymnastique douce, un sport de combat plutôt tranquille. Tout ceci est excellent.

L’intérêt de l’activité physique est double:

-Travailler la respiration, qui comme nous l’avons vu dans l’article précédent, est l’un des points essentiels pour rééduquer tout ce qui est lié à l’oralité.

-Se faire plaisir! L’activité physique génère une hausse des hormones du bonheur, endorphine, sérotonine et donc nous aide à voir la vie en rose. Plus nous voyons la vie en rose, plus nous sommes optimistes, plus notre corps génère d’énergie, et plus notre mental génère lui-même d’énergie. Et c’est cette énergie qui est le carburant principal que nous utilisons pour changer d’habitude, résister à nos mauvaises habitudes passées et poursuivre notre progression.

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Pour ceux qui n’ont pas fait de sport depuis des années, allez-y doucement! Une fois par semaine, pendant 6 mois, un an, c’est parfait. Ensuite, vous pourrez à loisir installer une seconde séance dans votre emploi du temps. Idéalement 3 fois par semaine (par exemple mardi, jeudi, dimanche), avec deux séances de sport, l’une de marche ou une de streching constitue un but tout à faire réalisable à terme.

Reste la question des activités. Nous recommandons le karaté, la marche, la natation, la cours à pied (mais à petite dose, pour ne pas abîmer les genoux), la musculation, le yoga, et même le chant qui est pratiquement un sport en soi, en plus d’être un art. Au fur et à mesure de votre progression, et notamment si vous avez beaucoup de poids à perdre, vous pourrez augmenter l’intensité de vos entraînements. Mais rien, absolument rien ne vous pousse à faire plus.

Changer d’amis ou changer de relation avec ses amis

Une part importante des addictions se font dans le cadre d’un groupe humain. Il faut bien en prendre conscience. Cependant, il est tout aussi vrai que les bonnes habitudes s’installent aussi par le biais d’un groupe. Et il est important de le réaliser également!

Le groupe

Certaines consommations de drogue se font en groupe. On sort le samedi soir. On va passer le dimanche après midi chez un ami. Et de fil en aiguille, on se retrouve à se faire « plaisir » en groupe. La drogue devient un moment de convivialité. Comme elles permettent souvent de baisser les inhibitions, les rapprochements sont plus faciles. Il en est déjà ainsi des personnes consommant occasionnellement de l’alcool. C’est peut-être le côté positif des drogues, elles peuvent servir à consolider un groupe. Heureusement, de nombreuses autres activités aussi. Il y a des groupes de judo, de karaté, d’échec, et même des groupes de thérapie, sur le modèle des alcooliques anonymes. Il n’est pas possible de continuer à appartenir à un groupe d’addicts et d’arrêter. Même si l’on réalise l’exploit de continuer à fréquenter le groupe sans prendre de substance soi-même, les centre d’intérêts, et principalement la manière de se faire plaisir, de rire, voir tout le système de pensée, vont irrémédiablement changer. On se retrouve seul, au milieu de personnes se livrant à leur activité, et l’on ne se trouve plus à sa place. On n’y est pas plus qu’une personne en jean au milieu d’un cours de judo, ou qu’un homme tout habillé plongé dans une piscine remplie de nageurs.

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Deux méthodes sont alors possibles:

-On peut continuer à voir un groupe d’amis en partant plus tôt, en faisant uniquement la première partie de la réunion, qui en général est supportable, et en s’escamotant pendant la seconde. Cela peut durer un temps, puis assez naturellement, les réunions vont s’espacer.

-La seconde méthode est de continuer à avoir des relations avec ces amis non plus en groupe, mais de manière individuelle. Cela ne devrait déjà pas concerner tout le groupe, mais certaines personnes uniquement. Les rapports en « couple » sont différents des rapports en groupe. On peut ainsi garder ses meilleurs amis très longtemps, avec une relation différente.

Le conjoint

Il y a le cas particulier du conjoint. Il est assez courant que le conjoint ait les mêmes soucis, ou se soient mis avec vous (ou vous avez lui), et ait suivi vos habitudes. Le conjoint est présent presque h24, et il est généralement très important pour l’équilibre. Quand on n’est plus enfant, le conjoint est une personne avec laquelle on a construit sa vie. La rupture éventuelle est un choix très personnelle. Elle peut apporter beaucoup de solitude, ce qui ne sera pas propice du tout au rétablissement. Le mieux est d’essayer de mettre en place quelques règles. Si l’un des conjoints souhaite arrêter de fumer, l’autre doit accepter de fumer en dehors de la maison, de ne pas laisser traîner ses cigarettes, voir de ne pas fumer avec son conjoint, mais de s’isoler. Idem pour les autres drogues, le conjoint doit accepter de ne plus les consommer au foyer, ce qui signifie parfois qu’il devra lui-même faire une partie du chemin vers la guérison, qui est aussi une dynamique sociale. Sinon, les tentations sont trop fortes et trop nombreuses. Il est déjà très difficile de changer, alors si une personne a en plus sous le nez en permanence la drogue a laquelle elle souhaite renoncer, c’est presque mission impossible.

Les relations toxiques

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En dehors des amis et du conjoint, il reste les parents, et les beaux parents, et les collègues de travail. Les parents sont parfois extrêmement toxiques (d’ailleurs, s’ils avaient été plus attentifs, on n’en serait sûrement pas là, dans la plupart des cas). Il peut falloir aller jusqu’à la « rupture » pour baisser les symptômes de mauvaise image de soi. Nous mettons « rupture » entre guillemets, car la place prise par nos parents dans notre psyché est si importante, que même à distance, même s’ils sont disparus, ils continuent de compter pour nous. Idem, il peut y avoir des beaux-parents envahissants, ou jamais avares d’une remarque désagréable. Ces relations peuvent faire énormément de mal. Elles sont très généralement à l’origine des troubles, qui marquent tout de même tous un défaut, des erreurs, dans l’éducation.

Multiplier les relations bénéfiques

A l’inverse évidemment, il convient de multiplier les relations bénéfiques, positives, de s’entourer de personnes qui nous vont bien. Cela peut être un vendeur au coin de la rue, un collègue de travail, parmi cent que l’on ne peut pas voir, un groupe de sport, un groupe religieux. On comprend mieux ainsi le rôle des groupes, des communautés, dans le soutien de l’individu. Le groupe fonctionne sur un but commun, des valeurs partagées communes, qui ne sont pas toujours les valeurs explicites. Il vaut mieux partager ses valeurs pour que la relation avec les membres fonctionne. Il n’est pas toujours évident d’aller s’inscrire dans un nouveau groupe, de se faire de nouveau ami, quand les addictions nous ont en général repliés sur nous-mêmes. On voit ici encore le rôle de l’éducation dans ce processus. Dès l’enfance, trouver des groupes, en dehors de l’école, qui permettent à l’enfant de s’épanouir et d’apprendre qu’il y a d’autres possibilités de liens, d’autres activité, compte énormément. Club sportif, groupe de musique, cours religieux, club divers et variés…

Se libérer l’esprit – la positive attitude!

L’addiction, ou le comportement plus ou moins destructeur, est dans le corps bien sûr, mais il est aussi dans la tête. Très souvent, un comportement que l’on peut qualifier de « déplacé », correspond à des idées, des émotions, à une estime de soi, qui ne sont pas suffisamment positives. Car l’addiction a une vraie raison d’être. Elle sert vraiment à quelque chose dans l’équilibre émotionnel. Elle compense une mauvaise image de soin, une difficulté à vivre. Elle apporte un plaisir, là où la vie n’est que ou presque que tristesse. Malheureusement, le « plaisir » donné par l’addiction, s’il est en partie nécessaire pour maintenir un rapport à la vie, est aussi un « mauvais » plaisir, car il est ressenti contre un prix trop fort. Perte de conscience, de neurones, déformation du corps, mise en danger des poumons. C’est un plaisir que l’on obtient en mordant sur nos propres réserves, alors sans doute que le plaisir devrait être dans un rapport à la réalité, aux autres, au monde, plus pacifié et optimiste.

D’ailleurs, toute modification des mauvaises habitudes va forcément entraîner une modification de l’estime de soi et même de la manière de voir le monde!

Cette la tâche, qui consiste à redresser la vision du monde, est la plus difficile, mais aussi la plus passionnante de toutes dans le chemin de la guérison. Il n’est pas possible ici d’aller dans le détail. Nous pouvons juste donner quelques indications:

Bouddha pensées

Les traductions du Bouddha sont toujours délicates. Plutôt que « pensées », on pourrait dire « émotions ». Nous sommes ce que nous éprouvons, ce que nous imaginons.

-Toutes les idées négatives sont… négatives. Surtout quand elles portent sur la manière dont nous nous voyons et nous jugeons nous-mêmes. C’est-à-dire qu’elles limitent a priori ou réduisent notre capacité à agir. Bien souvent nous mêlons à notre pensée une large par d’affect, d’émotion, de sentiment, même dans les pensées que nous croyons les plus rationnelles et les plus objectives. Il nous faut apprendre à ne pas rester sur une conception ou un jugement négatif. Il faut y trouver, d’une manière ou d’une autre, quelque chose de positif. Pour les anciens stoïciens, tout moment négatif était l’occasion d’un retournement vers un opposé négatif. Je suis né pauvre? Et bien, charge à moi de devenir riche! Je suis malade? A moi de trouver une cure, ou une manière de faire avec. La vie nous met au défi. Nous devons relever ce défi.

-L’émotion, et singulièrement la peur et l’espoir, déterminent la possibilité de l’action. N’avez-vous pas en effet remarqué que, dès que l’on a peur de quelque chose, celle-ci finit presque inévitablement par se produire? N’avez vous pas remarqué également que les personnes plus optimistes vont plus loin dans l’action que d’autres, quand bien même elles seraient largement moins intelligentes? C’est que l’émotion a un véritable pouvoir sur la probabilité de réussite de l’action. Voilà un grand mystère de la vie! La réalité peut se plier à notre volonté, jusqu’à un certain point bien sûr. Donc, soyez positifs, et vous en tirerez plus de fruits que si vous êtes négatifs. C’est ce que l’on appelle parfois « le pouvoir de l’intention ».

-Pour redresser nos idées, nous pouvons déjà toutes les classer en catégories: il y a tout ce qui touche à dieu et au destin, ce qui touche aux objets et à la matière, comme l’argent, ce qui touche aux autres, et enfin ce qui concerne notre propre vision de nous-mêmes, qui est largement conditionnée également par ce que nous pensons de dieu, des autres, du monde. Dans chacun de ces domaines, nous pouvons nous mettre au clair avec nous-mêmes. Dieu ne peut pas vouloir mon malheur, c’est incompatible avec sa définition. Idem pour la nature et le monde. Je dois régler mon rapport aux autres, mes attentes, mes demandes, ce qu’ils sont capables de faire. Etc. L’une des méthodes pour aller dans le détail de cette reprogrammation intellectuelle, est de faire comme le préconisent les Théories Comportementales et Cognitives (TCC).

Maîtriser et utiliser les pensées négatives

La doxa actuelle du développement personnel, de certaines thérapies, et d’une bien pensance un peu trop généralisée, voudrait que tout ce qui est négatif soir mauvais. Il est interdit de critiquer, de dire du mal. Chacun son chemin, sa vie, ses goûts, et finalement sa vérité. Mais défendre une telle thèse revient à confondre la liberté et les passions. La liberté s’appuie sur la raison et l’analyse – quand bien même cette dernière devrait être reprise et modifiée.

Quand nous souhaitons arrêter de fumer, nous avons apparemment le choix entre deux discours. D’un côté le discours positif: « nous serons libres, nous allons bien respirer, nous allons avoir plus d’argent ». Et de l’autre le discours négatif: « La cigarette, ça pue, ça coûte cher, c’est dégueulasse. C’est vraiment comme si je fumais du goudron. Je me déteste comme fumeur, et j’ai honte de moi d’être à ce point dépendant de cette drogue, qui nuit à ma liberté ». Quel est le discours le plus efficace?

Le premier discours, positif, se noie malheureusement dans une certaine mièvrerie impuissante. Il est beau, trop beau parfois. Il n’attaque pas directement le sujet, qui n’est pas de dire que respirer de l’air frais est sain – ce que personne ne nie. Le second discours, dans ce cas précis, touche juste et vrai. Fumer, c’est dégueulasse, et c’est bien ça le problème. Bien s’en convaincre génère un dégoût puissant. Et c’est exactement l’émotion dont nous avons besoin pour nous débarrasser de ce qui est nuisible. 

Il y a dans le corps des puissances d’intégration, et des puissances d’expulsion. Il en est de même des émotions. Les émotions positives nous attachent à ce que nous aimons, et les émotions négatives nous éloignent de ce dont nous devons nous éloigner. Avoir peur de la mort, ce n’est pas une émotion négative. C’est le bon usage d’une émotion négative. Nous devons aussi utiliser cette puissance.

La pensée bouddhiste, en tout cas de la manière dont nous la recevons habituellement, comme la pensée religieuse chrétienne, cherche l’union avec son principe. La recherche de l’union est leur leitmotiv, ce qui les conduit à négliger la puissance des émotions négatives.

Il y a donc une sagesse à utiliser correctement les deux types de pensées. Positive pour s’unir au bien. Négative pour se détacher du mal. Il est illusoire de penser que les pensées négatives vont disparaître. Il est bien plus utile de les orienter correctement, sur quelque chose que nous voulons changer en nous-mêmes, plutôt qu’en se lamentant sur le « sort » ou le « destin »? Cela nécessite de faire l’effort de penser que ce que nous faisons est nul et peut être changé. Trop d’entre-nous refusent ce chemin parce qu’ils ont peur de se regarder négativement. Parfois, cela leur est même impossible. C’est sans doute dommage, car le changement est un art difficile. Et nous changeons bien plus quand nous n’avons pas le choix que quand nous l’avons, quand nous sommes au fond du trou. Le dégoût des comportements inappropriés est à la fois utile et formidablement puissant. 

Il nous faudra utiliser les deux versions, pensées positives pour ce qui doit être positif, et pensées négatives pour ce qui est effectivement négatif. La distinction des deux peut sembler complexe, et elle l’est. Mais en ce qui concerne les addictions, il n’a rien de complexe. Elles sont mauvaises. Et si je veux arrêter d’y être soumis, je dois m’en convaincre jusqu’au plus profond dégoût.

Ainsi, dépassant même le super héros de Green Lantern, nous pouvons utiliser le pouvoir de la volonté, ou plutôt des émotions positives et négatives, pour nous soutenir en toutes circonstances. Il est fort possible qu’en devenant de plus en plus actif, la réalité se rapproche de plus en plus de notre volonté. Bien sûr, nous ne sommes pas seuls, et nous n’aurons jamais les pouvoirs des Jedi! Il ne s’agit pas de cela. Mais presque…

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