Liberté ou égalité, démocratie libérale ou démocratie populaire ?

Le régime de la démocratie libérale, qui est pour nous une évidence, est une anomalie du point de vue de l’histoire. La liberté est une idée quasiment uniquement occidentale. A l’intérieur des régimes libéraux, nombre d’entre-eux ne le sont pas totalement, notamment l’Inde, qui est également construite sur son toujours vivace régime de castes. La « libertocratie », reste très fragile, comme en Amérique du sud et encore plus en Afrique.

Pire encore, à l’intérieur même des régimes libéraux, la contestation populaire, anti-libérale, c’est-à-dire proprement anti-liberté individuelle, fait rage. Il n’y a qu’à voir en France même la place des partis extrêmistes, qui se rejoignent sur la haine de l’individu, pour constater que même au pays de la Révolution et de Descartes, l’individu, le « je » reste attaqué de toute part. En ce début de XXIème siècle, les régimes populaires, en Chine, en Russie, peut-être bientôt en Turquie, les régimes carrément théologiques, en Iran, Afghanistan, Pakistan, mais aussi en Arabie Saoudite, EAU et autres, ont le vent en poupe et sont en train de devenir le modèle principal.

Comment l’expliquer? Comment le comprendre? Ces régimes ont plusieurs caractéristiques communes, pas toujours magnifiques, que l’on peut regrouper autour de trois thèmes: un chef absolu, un régime égalitariste, un peuple soumis qui soutient le régime.

Un leader absolu

C’est la pire caractéristique des régimes autoritaires. Ils finissent tous par être dirigés par un dictateur. Et tous les dictateurs ont un profil psychologique très particulier pour dire le moins. Le leader absolu commence toujours par avoir une doctrine elle-même absolue. Il défend « son » peuple, « son régime », « sa » culture ».

Hitler, Poutine, Erdogan peut-être, Staline, Mao, Xi, Kim Jong Il, Louix IV, Napoleon, César, Castro… On pourrait multiplier les exemples à l’infini, le grand leader, adulé par les foules et célébré par l’histoire a en général tous les traits du pyschopate. Il n’a qu’un seul et unique but, renforcer son propre pouvoir. Pour arriver à ses fins il va utiliser tous les moyens possibles. Le vol du pouvoir et des richesses, le meutre, la guerre de conquête (pas la guerre défensive), la modification des institutions, la ruine du pays, l’instauration d’une religion unique, le muselage de la presse et des intellectuels, et tant d’autres joyeusetés.

Etre capable de réaliser toutes ces actions nécessite un caractère bien particulier. Menteur, manipulateur, sadique, paranoïaque, pas toujours dénué d’une véritable folie, le grand leader charismatique est un psychopate dont Staline et Hitler restent les grands modèles. Comprendre comment un tel homme peut parvenir au pouvoir, en passant à travers tous les filtres du contrôle social est un mystère qu’il faut élucier. Malheureusement, la récurrence du thème nous met immédiatement sur la voie d’une raison profonde. Il n’y a pas là de hasard, mais une réalité qu’il faut regarder en face.

Un régime de dictature

Le régime n’est pas forcément une dictature dès l’origine. C’est bien souvent après avoir été élu et en parvenant à se maintenir au pouvoir par-delà les limites imposées au renouvellement des mandats, que le dictateur parvient à assoir un pouvoir qui ne peut plus lui échapper.

the dark side: Machiavellianism, Narcissism, Psychopathy, and Sadism

Définir le régime de ce que l’on appelait auparavant un « tyran » n’est malheureusement pas quelque chose de très difficile. C’est exactement l’inverse des régimes de liberté dans lesquels nous vivons. Le régime du dictateur est un régime de concentration toujours plus poussée du pouvoir. Chef militaire, premier legislateur, chef économiste, chef religieux, responsable de la doctrine… il n’y a virtuellement rien qui échappe à son emprise. Toute contestation est étouffée dans l’oeuf. Tout écart par rapport à la norme est sauvagement pourchassé et désigné comme le coupable de tous les maux de la population. Le leader est revêtu d’une telle force symbolique qu’il désigne les ennemis, les impurs, les coupables, dont il faut se débarraser pour garantir la pureté de la communauté.

Le régime ne repose plus vraiment sur la loi elle-même, et devient essentiellement un régime répressif et instaure une société de contrôle. Elle va reposer sur un discours glorifiant le « peuple », la « grandeur » du pays, sa culture, sa religion, et les héros d’un passé mythifié. En même temps, le régime impose un certain nombre de valeurs, en général traditionnelles, l’obéissance, la virilité, le sacrifice pour la patrie, la croyance en dieu. Elle glorifie aussi le leader, qui devient dieu sur terre et se construit une image divine à travers le fameux culte de la personnalité.

L’individu n’existe plus. Tous les droits individuels disparaîssent. En dehors du leader, tous les autres doivent être et rester les rouages dans une machine. Le leader tue ou promeut. Il fait et défait les destins à la seule force de sa volonté. L’arbitraire est partout. Le droit de l’Etat, qui n’est en fait que le droit d’un seul, écrase tous les autres droits.

Une économie régulée

La haine de l’argent et des riches n’a d’égale que le dégoût de l’économie de marché. Lutter tous les jours pour son pain. Prendre à chaque grande décision économique le risque de se faire arnaquer, de ne pas obtenir le prix optimal. La peur de se faire avoir, la haine de celui qui a plus pousse au blocage des prix. Le prix bloqué est le symbole de l’égalité économique, quand bien même cela n’aurait effectivement aucun sens d’un point de vue économique.

4 mois après son élection, Poutine a réuni les plus puissants oligarches au Kremlin et les a prévenu de ne jamais faire de politique. Tout en les laissant opérer, il les a symboliquement dévalorisés auprès de toute la population et transféré ainsi tout leur pouvoir à sa propre personne. Qui va défendre les riches dans la rues? Personne! C’est au contraire avec le soutien du « peuple » que les riches perdent leur pouvoir.

La division du travail est un ferment de différentiation. On fera tout pour la faire disparaître. Les « intellectuels », toujours soupçonnés d’être des libres penseurs, devront être rééduqués et aller à la campagne, comme sous Mao. Le niveau intellectuel va partout chuter. En plus des tâches intellectuelles, certaines autres formes de travail, le commerce et la banque notamment, qui sont réputées ne rien produire, en plus d’être des « métiers de juifs », seront également mises sous pression. Seuls les métiers de la production et de l’alimentation peuvent être considérés comme de vrais métiers. Le tourisme, qui représente 10% de l’économie mondiale, ne servira plus à rien dans ces pays puisque les frontières seront petit à petit fermées pour préserver la « pureté » du peuple. Le secteur culturel, cinéma, littérature, théâtre et autre, sera réduit à la glorification des valeurs et lui-aussi radicalement restreint.

Toutes les couchent organisationnelles et hiérarchiques de la société seront attaquées pour leur inégalitarisme. En entreprise, c’est le « management », ce relais de l’oppression d’une classe dominante, qui sera la première victime. On défendra des idées comme celles de l’autogestion. Les objectifs de productions viendront directement du gouvernement, dont l’administration toute puissante va se substituer au si honnnis « management », c’est-à-dire à la bourgeoisie créée à partir de l’organisation du pouvoir. L’économie ainsi rabougrie, privée du développement de sa diversification horizontale, sans organisation verticale pour assurer productivité et qualité, repliée sur le seul pays ou quelques pays au niveau international, et dont les forces intellectuelles ont ainsi été réduites, n’aura que très peu de chance de ne pas sombrer dans la famine. Il devra nécessairement posséder un secteur agricole fort et suffisamment de matières premières pour l’énergie et l’industrie.

Tout devient peu à peu administré et contrôlé par l’Etat. L’administration est le bras armé de l’Etat, la grande créatrice de cette égalité mortifère. Elle remplace toutes les modalités de relations entre les citoyens et régit tout à leur place. Elle s’occupe de l’éducation des enfants à la place des parents. Elle étatise toute l’économie, ce qui est comme on le sait maintenant parfaitement bien, la meilleure manière de l’étouffer complètement et de ruiner la population. Derrière le fantasme de l’égalité économique se cache la misère commune. Derrière la sécurité de ne pas avoir à marchander toute la journée au risque de ne pas toujours gagner, ce cache la réalité des rayons de magasins complètement vide. Lors de son premier voyage aux Etats-Unis, Boris Eltsine a demandé à s’arrêter de manière impromptu dans un super marché. Il ne croyait pas les images de la télévision et de ses services. Il a vu de ses yeux et à exposé lui-même que le moindre supermarché américain proposait une offre, une qualité et une variété à laquelle même le politburo n’avait pas accès.

Un peuple consentant

C’est bien là l’élément le plus troublant. L’Allemagne, l’un des pays les plus avancé au monde, pour ne pas dire le plus avancé, a suivi quasiment comme un seul homme un fou furieux. La Corée du nord meurt de faim plutôt que de se révolter. Quelques russes interviewés pendant la guerre d’Ukraine affirment haut et fort qu’il faut éradiquer tous les ukrainiens et tous les polonais, qui sont tous des nazis. Les femmes iraniennes ont crée une gigantesque révolte qui ne parvient pas à se transformer en Révolution. La Chine tout entière obéit désormais à un seul homme. Les russes qui ne voulaient pas rejoindre l’armée après l’annonce de la conscription pour rejoindre le front ukrainien n’ont pas crée un mouvement anti-Poutine à l’étranger. Les islamistes n’ont pas entamé de révolution intellectuelle après les attentats du 11 septembre. Réel sur le long terme, l’avancée de la démocratie libérale reste limitée, trop limitée.

Alors pourquoi? Que peuvent bien offrir ces régimes, qui par delà toutes leurs horreurs soit suffisamment puissant pour y maintenir autant de milliards d’hommes et de femmes à travers toute l’histoire humaine? Encore plus incompréhensible, comment autant de milliards de personne ont-elles pu et peuvent elle encore se soumettre à l’autorité d’un psychopate qui le plus souvent, voir quasiment toujours, finit par mener son peuple et son pays à la ruine? Il est fondamentale d’affronter cette question en face. Un tel phénomène ne peut reposer que sur des traits essentiels de la nature humaine.

Une folie autorisée

La plupart des régimes , y compris dans nos démocraties libérales, les lois et les institutions ne font presque rien contre les psychopates. Ils ne sont pas reconnus comme des dangers sociaux. Ils sont souvent glorifiés, au cinéma ou dans la vie économique. La parole des victimes est la plupart du temps inaudible, parfois même quand il existe des mécanismes de receuil de cette parole. Le mensonge n’est pas du tout combattu et n’est même pas reconnu comme un objet juridique en France.

Le psychopate connaît parfaitement ses règles et semble toujours parvenir à ne pas prendre le moindre risque ou réussir à tourner le système à son avantage. Il existe des gardes-fous, mais de manière assez intéressante, pas partout. Il y en a dans la médecine, dans l’enseignement supérieur, dans la police, dans la comptabilité (à ne pas confondre avec la finance). Partout où un haut niveau d’étude est exigé, partout où il existe un contrôle social de la corporation sur ses membres, le contre-feux fonctionne assez efficacement. Mais il est des domaines majeurs dans lesquels ces contre-feux n’existent absolument pas, au premier rang desquels la politique et l’entreprise. Des hommes et femmes politiques irresponsables peuvent parvenir aux responsabilités (Berlusconi ènième exemple) et des tyrans peuvent diriger des empires.

Ce n’est pas un hasard, c’est un système. Dans ces deux domaines, le pouvoir et l’argent, la personnalité des pyschopates non seulement ne fait pas l’objet d’un contrôle, mais elle est même encouragée par le système, y compris dans un modèle libéral. Si ce n’était pas le cas, il serait impossible d’avoir des dirigeants politiques démagogiques comme nous les avons. Il serait aussi certainement impossible de bâtir les empires financiers actuels.

Les systèmes démocratiques se protègent dans ces deux domaines par deux règles indéfiniement déclinées, celle de l’interdiction de la concentration des pouvoirs et celle du débat contradictoire. En politique le pouvoir est divisé entre législatif, exécutif et judiciaire, mais aussi administratif, et économique, le pouvoir de battre monnaie étant éloignée de la sphère du pouvoir politique. En justice, c’est toute la structure des jugements, appels, contre appels, vérification de constituationalités, etc.. qui brise le droit, parfois à l’extrême. En économie, la règle suprême est celle de la non concurrence, c’est à dire là-encore de l’obligation de la pluralité des acteurs d’un même secteur. Aucune entreprise n’a le droit de devenir le « dictateur » de son secteur.

Nous ne sommes ainsi jamais vraiment à l’abri de ce type de personnalité, comme le montre suffisamment l’arrivée au pouvoir de Trump et sa tentative de destabilisation des institutions démocratiques américaines. Cet événement est d’autant plus notable que les Etats-Unis sont sans doute l’un des seuls pays au monde a n’avoir jamais connu de changement réellement profond de Constitution.

Un peuple qui aime son régime

Le « peuple » est le grand mot, la grande notion défendue par tous ces régimes. Le « peuple » désigne autre chose que l’ensemble des citoyens ou des individus. Le peuple s’oppose même à l’ensemble des citoyens. Il est une entités continue, dans laquelle les individus sont indifférencies. Il est la ruche des abeille ou la fourmillière organisée autour de la reine. Il n’est pas une somme de partie, comme un corps, car il n’est pas composé de partie différenciée ayant chacune sa fonction. Il est une seule entité. Il n’a plus qu’un seul esprit.

Start Trek, the Next Generation- l’Enterprise face à son pire ennemi, le cube Borg. Les Borgs sont un collectif d’être humanoïdes rattachés à leur reine par un giganteste dispositif technologique qui les a tous transformés en machines reliées en réseau. Une belle préfiguration de la société de contrôle sociale chinoise.

L’animal grégaire

L’ennemi du peuple est l’individu. C’est aussi simple et implacable que cela. Tout doit être commun. Tout ce qui n’est pas commun est dangereux et nuisible. Le peuple ne veut aucune tête qui dépasse. Il veut l’égalité, car l’égalité est la preuve même que le peuple existe. L’individualisme est l’affirmation de la différence qui rend chacun non comparable aux autres. La liberté, c’est aussi la liberté de ne pas être égal, donc d’être différent. Le peuple déteste la différence. Il ne veut pas de ce commandement moderne qui nous harcèle partout « be yourself », sois toi-même. Etre un individu est épuisant. Cela nécessite un questionnement permanent sur la personne que nous sommes. Il faut accepter une certaine solitude, ce que le groupe refuse absolument. Il préfère la chaleur des liens sociaux incompréssible. Le groupe et la doctrine de l’Etat lui convient parfaitement. il veut obéir et que tout le monde obéisse. Mais le sacrifice total de l’individualité n’est pas plus possible que celui du groupe. Totalement désindividualisé, l’homme perd sa dignité, sa créativité, son envie de vivre elle-même. Et cela convient tout à fait à un régime qui n’a pas d’autre ambition que de le conduire à la mort.

Défendre le peuple et l’égalité, c’est du pareil au même. D’où vient cet amour pour l’égalité? La première source, animale, est le fondement grégaire de la société humaine. Nous ne pouvons pas exister réellement seul et par nous-mêmes. C’est extrêmement difficile, voir impossible puisque nous naissons les uns des autres. Nous vivons en interactions. Le principe grégaire, l’homme animal social « zoon politikon » d’Aristote, veut et se sent bien en groupe.

Le premier groupe est celui de la famille. Une partie de notre psyché est construite et arrimée à celle de nos proches. Quand nous perdons un parent, c’est une partie de nous-mêmes, de notre mémoire, de nos actions passées, de nos moments de joies et de tristesses que nous perdons. Maintenant que l’autre n’est plus, qui pourra nous garantir que tout ceci a bien été réel? Qui prouve que nous existons? Tout le monde ne peut pas se fonder dans la conscience de sa propre pensée. Le « je pense donc je suis » cartésien nécessite tout de même de penser. Ce n’est pas aussi évident, ni aussi fort chez la majorité des personnes pour être suffisant pour fonder partout l’identité individuelle.

Le second groupe est celui de la religion. L’Etat n’arrive qu’en troisième position. Le dernier groupe est le groupe économique. C’est le moins important. Les familles et les groupes vivant ainsi refusent autant que possible toute forme de remise en cause. Or la liberté est remise en cause permanente. Le groupe veut une société figée, traditionnelle, sans changement, qui lui permette de ne jamais changer quoique ce soit. L’immobilisme est sa principale valeur.

L’amour de l’égalité est aussi une haine de l’inégalité et de la différence. Pourquoi détester l’inégalité? Pourquoi détester la différence? Vu de notre fenêtre, de nos pays qui glorifient la différence, la singularité, qui cherchons à la protéger et lui accordons une grande valeur, ce phénomène est difficile à comprendre. Une hypothèse possible est celle de la jalousie. Ce que nous voyons en permanence chez les égalitaristes, c’est la haine. La détestation des « riches », des « juifs », des « étrangers », des autres religions, des autres pays. C’est une véritable allergie. La première vertu semble l’intolérance totale. La haine des riches ressemble beaucoup à une jalousie pure et simple. Jamais il n’est fait état d’une demande de modification de la distribution des richesses ou des pouvoirs.

Après l’échec du communisme, qui n’est qu’une version exacerbée de l’égalité, les nouveaux régimes dictatoriaux ont cependant tous accepté une forme d’oligarchie. Il y a des milliardaires en Chine et des Oligarches en Russie. Mais ces ultra-riches n’ont le droit de survivre que dans la mesure où ils servent le régime. On ne compte plus les disparition de riches en Chine et les morts plus ou moins suspectes d’oligarches en Russie (Roman Ibrahimovic a échappé à la mort de justesse). Les riches sont un mal nécessaire, surtout face à un Occident toujours plus riche, toujours plus puissant. Les dictateurs modernes ont appris de l’échec économique du communisme.

La structure familiale

Le groupe est une seule grande famille. Le pouvoir du grand homme est le pouvoir du père. Staline se faisait appeler dans une formule saisissante de vérité « le petit père des peuples ». Il ne peut y avoir qu’un seul maître, un seul père ou chef de famille. Les membres d’un groupe déteste la multiplication des autorités. Ils ne supportent pas d’obéir si ce n’est au chef suprême ou au chef religieux. Seul le chef a le droit de gratifier ou de blamer. Seules les récompenses du chef sont acceptées. C’est ainsi que se déclenche la course aux honneurs. On en garde de nombreuses traces en France. De nombreuses activités économiques toujours vivantes ont commencé en obtenant un « privilège royal », ultime et magnifique distinction! Dans un groupe, on préfère être distingué par le roi que d’être un vulgaire « self made man »! On tient son pouvoir de la source de tout pouvoir. La reconnaissance de soi-même ne vient pas de nos propres mérites ou de notre famille, mais de la distinction insigne, de la reconnaissance du chef suprême.

Le régime populaire tient chaud. Il cherche à répondre à la promesse de la disparition de toute solitude et de l’épanouissement dans la vie de groupe. Mais ce rêve du retour à l’enfance, à l’inconscience du pré-pubère est mortigère pour des adultes contraints d’y sacrifier leur individualité.

Agressivité partout

Ces régimes seront toujours agressifs envers tout élément exogène, tout ce qui est extérieur. Toute différence est pour eux une menace. Ces leaders sont incapables d’arrêter leur folie à l’intérieur de leur frontière. Leur succès confirment selon eux qu’ils ont eu raison de commettre toutes les atrocités qu’ils ont déjà commises. Il vont donc lutter par tous les moyens contre la liberté individuelle, partout sur la planète. Leur politique extérieure est la même que leur politique intérieure. Les doux concepts de « non ingérence » et de « liberté d’expression » sont pour eux des aubaines et ils vont d’autant mieux s’en servir contre nous, ils savent d’autant mieux les exploiter, qu’ils ont déjà totalement réussi à les mater dans leur propre royaume. Seule la force militaire, c’est-à-dire la peur de mourir, peut les arrêter.

Un excellent site, regorgeant d’anecdotes sur les dictateurs

Un paradoxe insoluble ?

Comment de tels régimes peuvent-ils survivre? Comment des peuples entiers peuvent-ils se laisser conduire ainsi par des psychopates? Comment des personnalités aussi extrêmes peuvent-elles arriver au pouvoir? Voilà le paradoxe absolu, le défi posé à l’intelligence par de ce mécanisme pourtant si courant. Il explique cependant pourquoi de tels régimes ne peuvent que mal finir. Mais avant de mal finir, ils ont quand même réussi à exister. Le psychopate offre au peuple tout ce qu’il demande. Il contrôle tout. Il coupe toutes les têtes. Il maintient l’égalité dans la misère du peuple en concentrant en lui-même tous les pouvoirs. Il autorise une forme de sadisme qui se répand de sa personne à tous les niveaux de la société. Le modèle du chef, l’autorisation donnée par le haut de la pyramide irrige les structures de commandement et de crontrôle et même la cellule familiale. Les maris asservissent les femmes et l’éducation nationale endoctrine les enfants. « Mon père est l’URSS, ma mère est le communisme » devaient réciter tous les matins les enfants russes. Il donne libre cours à la haine. La vidéo de l’assassinat d’un militaire ukrainien fait prisonnier devient virale sur les réseaux. Il contente la jalousie. Les oligarches chinois disparaissent des écrans radars pour purger toute la haine que leur succès à déclenché dans la société. Tous les opposants politiques sont élminés.

Montesquieu nous a prévenu « le pouvoir rend fou et le pouvoir absolu rend absolument fou ». Le psychopate finit par s’identifier totalement au peuple. Tout ce qui lui nuit ou peut lui nuire est une menace directe contre le peuple. Pour éviter toute révolution lors de son décès, il faudra fonder une dynastie et donner le pouvoir à sa descendance. Il n’y a que trois manières de s’en débarrasser. Sa mort par maladie, parfois rendus plus facile par sa paranoïa. Son assassinat par son entourage, comme ce fut le cas de Jules César. C’est malheureusement une exception. Et enfin la défaite militaire et l’exil, comme pour Napoléon, Hitler, Saddam Hussein. Staline est lui mort dans son lit.

La population accèpte ce sadisme d’Etat. Elle en profite même. Tous ceux qui sont punis rappelle au membre du parti ou du pays que lui est obéissant et n’a rien à craindre du pouvoir. Tout crime de l’Etat le conforme dans l’idée qu’il a le comportement adéquate. Il devient aveugle à l’arbitraire. Il préfère cette fausse justice implacable au hasards de la vie. Le peuple choisit son leader ou l’accepte comme étant son image. Il vit le pouvoir par procuration directe en s’identifiant au chef et a l’impression d’être plus puissant que s’il était dans un régime de liberté, dans lequel il devrait tous les jours faire ses preuves et être confronté à la concurrence. Ils sont comme des enfants enfermés volontaires et satisfairs dans l’amour de leur parent.

Mais le vers étant dans le fruit, le leader étant très proche de la folie et alimenté uniquement par des passions négatives, bloquant toute circulation d’énergie créative, sauf dans l’armement, le régime finira toujours par être en faillite. Le leader vit dans la solitude la plus extrême, sans plus aucun contact à l’alterité. Il ne peut plus se remettre en question. Comme tous les menteurs pathologiques il devient complètement paranoïaque, persuadé que tout le monde lui ment. Il devient fou. La population qui ne se régénère pas déclinera forcément. La démographie chute inéxorablement. Le monde libéral qui continue à progresser autour de ces pays va forcément les dépasser de toutes les manières possibles et imaginables, car ils maintiennent vivent les forces créatives de la nation et des individus.

Liberté, fragile liberté

L’argumentation que nous avons présentée s’appuie en grande partie sur le cas extrême de la dictature. Même des régimes dit dures ne parviennent pas tous à cet état extrême de pourrissement psychopatique. Nous voyons au contraire partour les équilibres plus ou moins assurés ou précaire de ce Janus politique.

La Chine par exemple, n’est pas encore une totale dictature. Son peuple, sa classe moyenne récemment créé, est un puissant ferment de liberté. Mais tout ceci pourrait disparaître assez rapidement, en moins d’une génération, tant le contrôle du parti est fort sur le pays. Les Etats-Unis, pays de l’individualisme, le seul pays où il exite réellement des libertariens, c’est-à-dire des personnes pronant la disparition totale de l’Etat, ont connu une sérieuse alerte anti-démocratique avec l’assaut des partisans de Trump contre le Capitole. Les Etats-Unis poussent l’individualisme tellement loin que chaque individu deviendrait presque un Etat en soi, toute coordination étant structurée par le marché, c’est-à-dire en fait par des règles ad hoc de chacune des transactions particulières. Chacun a le droit d’être armé et d’être d’une certaine manière sa propre armée privée. Mais cet extrême est tout aussi impossible que le totalitarisme négateur de tout individu. Les Etats-Unis équilibrent leur individualisme par la croyance en dieu et par l’amour de la patrie et de la Constitution, qui tous trois défendent les libertés individuelles.

En France, la gauche révolutionnaire, cachée sous le faux nez de « l’insoumission » cherche tous les jours à détuire le régime au nom de l’égalité. Comme la Russie de Poutine, elle appelle « nazis » tout ce qui est défense de l’individualisme, dans un retournement de valeur consternant. La France est le pays le plus conscient de la difficulté à unir ces deux valeurs, toutes deux incluses dans sa devise: « liberté, égalité, fraternité ». La tension permanente qui existe dans le pays y est complètement étouffante. Il n’y a pas une journée, pas une heure de l’actualité française ou le problème de la synthèse de la liberté et de l’égalité ne soit sur le devant de la scène. La France es le pays des Lumières et du Romantisme en même temps. Elle élit régulièrement un monarque républicain qu’elle s’empresse de détester. Elle cherche un sauveur, comme De Gaulle, et s’empresse de condamner à traverser le désert. Le français veut être libre et peuple en même temps. On dit souvent que la France est le seul régime communiste qui a réussi.

Au Canada, c’est au contraire la gauche woke qui s’est lancée dans une course étrange et paradoxale à l’égalité de toutes les différences, y compris les différences fantasmées et saugrenues. On doit espérer qu’il ne s’agit que d’une péripétie et que le régime libéral sera suffisamment solide pour absorber et organiser les différences, ce qui est bien sa plus grande force. L’un des fondements du wokisme est la déconstruction française, aux sinistres racines communistes (Derrida), et irrationaliste (Foucault et l’Histoire de la Folie). On voit clairement la cohérence entre la destruction de la raison et de la glorification des régimes populaires. C’est l’instinct, l’animal, la bête qu’il s’agit de faire ressurgir. Les véritables continuateurs d’Heidegger ne sont pas ses propres élèves, Arendt, Strauss, Lévinas et autres, mais bien les déconstructeurs français. La nature animale vaut mieux que la nature rationnelle. Dieu est force et élan vital, il n’est pas raison et mathématique.

On mettra tout de même Deleuze un peu à part, lui qui a tant penser la différance et pas uniquement pour l’opposer à la raison.

Il nous faut, en tout cas pour tous ceux qui souhaitent voir continuer le règne de la liberté, rester vigileants et développer ou redévelopper, un arsenal anti-populisme, anti-égalitariste et anti-totalitaire. Tous les exemples précédents montrent que la principale thèse politique des Lumières, celle de l’inaliénabilité de la liberté individuelle est malheureusement un voeu pieux. Non, il n’y a aucune limite au pouvoir qu’un homme peut prendre sur un homme ou sur un pays tout entier. Que vaut la liberté de penser quand il n’y a plus, comme en Corée du Nord, de livre, d’électricité, et même plus suffisamment de nourriture pour éviter la réduction de la taille des habitants et la chute de leur durée de vie? Que vaut la liberté de choix quand un tyran menace d’éxécuter tous les membres de votre famille, de les torturer ou de les mutiler? Un tyran peut transformer les autres hommes en quasi-animaux. La liberté individuelle est faible, elle doit entretenue comme le feu des premiers hommes. Ecrasée par le tyran, elle l’est tout autant par les multiples couches sociales qui composent une société. Ce n’est pas la relation d’un seul individu face à l’Etat. Le plus grand danger cependant reste le consentement volontaire à cette tyrannie de l’idéologie et la soumission à un pouvoir qui détruit la raison et l’individu. Les fondements de notre philosophie politique doit être repensés pour prendre en compte cette faiblesse intrinsèque de l’individu.

La tention entre régime égalitariste et régime de liberté reste le plus important principe des relations internationales. Nous voyons tous les jours que nous ne sommes pas assez prémunis contre ces puissances grégaires de servitude. Nous devons notamment mieux organsier nos libertés pour qu’elles ne puissent pas donner aussi facilement prise à la propagande anti-liberté. Voici un programme qui mérite de continuer à être développé, même si les principes de ce combat ont déjà été en grande partie éclairés dans cet argumentation. C’est bien la liberté qui doit guider le peuple, et non pas le peuple qui doit étouffer la liberté. C’est sous l’égide de la liberté qu’il faut organiser les rapports de la liberté et de l’égalité, de l’individu et de la collectivité, sous le régime du droit et non de la force.

Annexe

Pour donner un exemple de la thèse libérale, celle qui défend l’idée désormais dépasée que l’homme a des droits insubmersibles sous la puissance de la tyrannie:

Spinoza – Traité politique §8

« D’où la conséquence: Aucun acte, auquel jamais ni espoir de récompense ni menace de châtiment ne saurait décider quelque individu que ce soit, ne saurait être ordonné par une législation nationale. Par exemple, aucun homme ne saurait renoncer à l’exercice de son jugement. »

Ce passe est d’ailleurs l’un symbole de la problématique de la liberté autour de laquelle tourne la philosophie de Spinoza. Car dans tout le reste de sa démonstration, Spinoza ne parle que de la puissance naturelle de chaque homme, et que le rapport entre la pensée et les passions dans la composition de cette puissance n’est jamais vraiment explicitée.

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