Epicure, notre maître
Le grand Epicure nous l’a bien dit, une vie sans plaisir ne vaut pas la peine d’être vécue. Le plaisir est une composante essentielle du bonheur, de la joie de vivre. Il est donc essentiel de bien s’occuper de notre propre plaisir. C’est une part essentiel du soin que nous nous devons, soin pratique et quotidien.
Epicure -314 -270 av-JC
Epicure est un philosophe aussi célèbre qu’il est mystérieux. Nous n’avons conservé de lui que quelques pages, derniers vestiges d’une oeuvre immense. L’interprétation de ce penseur hédoniste (hédoné = plaisir en grec) est donc largement sujette à caution.
Un néo-épicurisme contre 3 objections faites à l’épicurisme historique
-D’un côté ses détracteurs, appelons-les « les sérieux » expliquent qu’on ne peut pas faire passer le plaisir avant tout, et notamment pas avant le devoir. C’est l’objet des « moralistes », reprise de Cicéron à Kant. Cette objection est forte et ne peux pas être écartée. Au plus peut-on dire que l’un, le devoir, ne doit pas empêcher l’autre, le plaisir, quand bien même il serait, comme c’est le cas chez Kant, de deux ordres totalement différents. Nous pouvons d’ailleurs douter de la différence de ces ordres, entre métaphysique, ou purement intellectuel d’un côté, et sensible ou matériel de l’autre, en rappelant simplement que les idées produisent également des sentiments, ou qu’elles sont toujours reliées à une joie ou une tristesse. Et c’est particulièrement le cas de l’idée morale, qui n’est pas sans contenu émotionnel, bien au contraire.
Pieter Schoubroeck – La destruction de Sodome et Gomorrhe – Genèse 18:20-21 – Les villes sont détruites par Dieu qui les punit de s’être enfoncées dans les péchés de la chaire.
-D’un autre côté, les caricaturistes décrivent l’épicurisme comme une doctrine de la jouissance à tout crin. Le disciples d’Epicure sont des « pourceaux », des porcs qui se vautrent dans la luxure, le vin, le sexe, la nourriture. Ils vivent pour manger et non l’inverse. Cette présentation est une caricature à peu prêt total, aussi grotesque que malhonnête, cachant la valorisation d’une forme acètisme un peu masochiste qui nous dirait qu’il faut souffrir à la peine, et que là est le prix du bonheur. Regardons ces défenseurs de la vertu dans leur vie de tous les jours. Ouvrons les portes de leur somptueuses demeures. Et que voyons-nous? Les meilleurs vins et les couverts en argent. Les tissus les plus fins, et les bijoux les plus brillants. Ils ne refusent rien à leur plaisir. Mais ils le refusent toujours aux autres! Ces autres qui sont faits pour les servir, faire leur ménage, réparer leur voitures et leurs toitures. Gagner leur argent. Oui, pour tout ce peuple de serviteur, il faut absolument maintenir l’idée, la fiction de la peine, du mal. C’est un discours de classe qu’ils ne s’appliquent jamais à eu même.
-Mais il faut encore régler nos comptes avec Epicure lui-même et son acétisme. Epicure distingue ce qui est naturel et nécessaire, naturel et non nécessaire, non naturel et non nécessaire. Les plaisirs qu’il défend sont limités à cette seule catégorie de naturel et nécessaire. Un jus de fruit? Certainement pas. Cela n’est pas nécessaire. Un café? Non mais vous voulez rire? Ce que le 18ème siècle, sous les plumes de Rousseau et de Voltaire, qui se chamaillaient sur la question, appellera le Luxe, est totalement absent du plaisir d’Epicure. C’est impensable pour nous, homme moderne. On se demande comment un penseur réduisant autant le champ du plaisir a pu en devenir le symbole! Une telle restriction nous paraît impossible, pour la raison suivante.
Le Jardin d’Epicure
Se faire plaisir tous les jours, le meilleur moyen de conserver son équilibre
Epicure n’est pas allé au bout de sa logique du plaisir. En tout cas pas dans les écrits qu’il nous a laissés. Il nous explique parfaitement que nos idées de Dieu, de la nature, de la physique et de la mort, ne peuvent être telle qu’elles nous rendent malheureuses. La conscience malheureuse si chère à Kant, qui soutient que si les dieux avaient voulu faire l’homme heureux, ils ne lui auraient certainement pas donné l’intelligence, est totalement refusée par Epicure. La tristesse, la mélancolie qui s’attache à une idée est la preuve de son erreur. La pensée participe de notre plaisir et de ne notre peine.
Mais Epicure n’a donné qu’un champ très étroit au plaisir. Bien trop étroit pour être véritablement praticable dans nos sociétés modernes et pour une personne qui ne fait pas profession de philosophie ou de prêtrise, qui n’est pas isolé dans un Jardin ou un monastère. Tous les jours, nous serons heureux aussi à mesure des plaisirs que nous pourrons prendre. Pour donner une nouvelle extension au plaisir, il faut trouver de nouveaux critères.
-Les plaisirs doivent être variés, dans une journée, une semaine, une année. Ils servent en tout temps à augmenter notre activité, ou à la structurer.
-Les plaisirs ne doivent pas contribuer à nous faire du mal. Ainsi l’alcool, la cigarette, les drogues diverses, ne sauraient constituer un plaisir. De même, tout ce qui sera pour nous « trop »: trop de sport, trop de nourriture, trop de sommeil, voir trop de travail, ne sera pas un vrai plaisir. Le plaisir doit inclure une certaine douceur, et pas une forme de « défonce » d’une manière ou d’une autre.
-Les plaisirs doivent contribuer à nous aider à prendre soin de nous-mêmes. C’est d’ailleurs ainsi, en se faisant plaisir de manière simple et régulière, que nous nous protégerons le mieux des peines et des risques de compensation qui y sont associés. Car c’est en cela seul que consiste la véritable débauche, l’immodération dans les plaisirs, rendue quasiment nécessaire par le poids des peines que nous devons compenser.
Pour se faire, nous proposons d’établir la liste de nos plaisirs, et de nos déplaisirs. Ces listes, qui peuvent tout à fait évoluer avec le temps, doivent nous aider, quand l’ennui nous prend, à trouver de nouvelles activités pour nous donner suffisamment de plaisir chaque jour. Il s’agit donc bien d’un guide, dont la visée est toute préventive. En nous procurant suffisamment de plaisirs quotidiens, nous nous prémunissons des peines et de tous les comportements qui les accompagnent.
La liste de nos plaisirs
Ce que j’aime
-Ecrire, des textes, des histoires
-M’occuper des enfants, et notamment de leurs devoirs. Préparer leurs apprentissages, leurs activités.
-Les documentaires
-Les films
-La musique, la chanson
-Danser
-Faire du yoga
-Les oiseaux, le chant des oiseaux
-Les voyages
-Le café
-L’eau
-Ranger
-M’occuper des plantes
-Jouer à Civilisation
-Nager
-Me promener
-Faire du vélo
-Le poulet
-Les salades: poivron, tomate, concombre, oignon, poireau,
-Les amandes et les noisettes
-Discuter avec des amis par messagerie
-Voir de grandes quantités d’objet nouveaux.
-Regarder des personnes travailler
-Méditer sur l’instant, le plaisir, la détente, le silence,
-Faire de la musculation
-Aérer
-Les paysages
-Prendre soin de mon corps: me laver, m’entretenir.
-Les vidéos de jeux sur Youtube
-Être mince et léger
-La bourse
-Lire le journal
-Les livres de philo
-Collectionner des livres pour ma bibliothèque
-Faire du sport devant la télévision
-Prendre un goûter
-Rencontrer de nouvelles personnes
-Aller au cinéma en hiver
-Faire la sieste après le repas
-Apprendre, dans certains domaines, en science, en histoire.
-Les civilisations anciennes
Ce que je n’aime pas:
-Avoir trop chaud, au-dessus de 24° et avoir trop froid, en dessous de 18°
-Trop manger
-Je n’aime pas trop mentir
-Je n’aime pas postuler pour un nouveau travail
-Les discussions avec des imbéciles
-Quand je suis fatigué et que je ne peux rien faire
-Quand je pense trop en dessous de la ceinture.
-Les voyages trop long en avion ou en train me fatiguent beaucoup
-Quand je m’ennuie soir parce que je n’ai rien à faire ou plus de force pour faire.
-Les sons trop aigus
-Les jus de fruits ou les aliments trop sucrés qui attaquent les dents.
-Avoir un mauvais goût dans la bouche
-Les personnes qui fonctionnent en boucle
-M’enfermer au cinéma en été
-Rester sans rien faire au soleil ou à la mer