Le secret de l’Eveil, de Spinoza à la Kundalini hindoue (1/2)

Quoi de plus mystérieux que la promesse de béatitude éternelle et d’éveil que nous promettent les philosophies et les religions? Voici leur secret pleinement et clairement révélé. Bonne lecture à toi, futur éveillé !

Finitude radicale

Il était une fois l’homme, un animal démuni de tout. Sans fourrure contre le froid, sans griffe contre les fauves, sans croc pour mordre les chaires. Faible, mourant souvent dès la naissance, vivant quelques années à peine, et sujet aux maladies, il passait ses journées à chercher de la nourriture et à survivre. En plus de tous ces maux, l’homme était conscient de sa faiblesse. Il ne suffisait pas à la nature de le charger de tous ces maux, il fallait encore qu’il les vive en esprit. Si la nature avait voulu que nous fussions heureux, elle ne nous aurait pas donné la conscience.

Incapable de comprendre la racine de son mal, l’homme inventa le péché originel. Cette vie de misère devait être l’expiation d’une faute commise aux temps immémoriaux. Comment comprendre autrement la cause de tous ces malheurs ? Expliquant le mal, la faute originale ne permettait pas de s’en libérer. Pour certains, c’était impossible. L’homme est une victime ontologique, une partie détachée de la divinité et condamnée à l’errance et à la souffrance. Pour d’autres, une série de règles, de lois, de pratiques, devait permettre de compenser et de corriger cette perte fondamentale.

La consolation

Suivre les lois et les préceptes des sages et des prêtres ne suffit cependant pas. La douleur est premièrement celle du corps, et c’est de lui qu’il faut s’occuper. Une partie de notre être fini ne semble pas parler le langage de la raison. Il faut lui tenir d’autres discours. Faible. Limité. Presque toujours en demande, le corps cherche un réconfort à son niveau.

Socrate en Bouddha

Quelles sont les consolations du corps ? Nous ne les connaissons que trop. La nourriture excessive, le sport, le sommeil, l’alcool, la drogue, et bien sûr, le sexe. Le corps ne cherche pas qu’à compenser ses faiblesses et ses limites, ou à se maintenir en vie. Il cherche à compenser la tristesse de notre finitude et de toutes les pensées de la séparation. C’est ainsi qu’il va chercher tout ce qui lui donne un plaisir extrême et rapide, sur le modèle de la drogue. Il s’agit pour lui, comme pour l’esprit, de rechercher un état de complétude et de plénitude. D’être délivré quelques instants ou quelques heures de son sentiment de finitude, s’accorder une pause dans la souffrance de la séparation, quitte même à se rendre malade, à dépasser ce qu’il peut contenir, pour compenser une souffrance qui justement le dépasse. Partout la médecine nous vante les bienfaits d’une vie d’équilibre. Bien manger, bien boire, bien dormir, faire une activité physique régulière. Mais les dérapages sont structurels. Le corps est le cheval fou du Phédon de Platon. Il ne comprend pas la mesure. Étranger à l’équilibre, il est perpétuellement dans l’excès ou le défaut. Il souffre par définition, victime de sa propre nature essentiellement finie, incomplète, soumise à la maladie et au manque.

En définitive, ce qui contente le plus le corps, c’est la jouissance sexuelle. La nature emploie deux ruses principales pour nous y amener, la beauté et la compassion. La beauté nous donne l’image d’une totalité équilibrée pleine et parfaite. Nous la trouvons principalement dans la contemplation et l’admiration de la nature et dans celle des corps et des visages. La compassion nous fait voir la détresse de l’autre et fait naître en nous le désir de l’aider. L’amour et le sexe vont de pair avec l’idée d’union avec un autre être, et d’unité à travers cette union. C’est la force du discours d’Aristophane dans Le Banquet de souligner l’importance de la création d’une unité dans l’amour. Aristophane suppose qu’une partie de l’humanité provient d’êtres originellement complets, puis coupés en deux, et qui retrouvent ensuite dans l’amour et le sexe leur unité primordiale. Il vise ainsi très juste. L’amour est l’illusion d’une union qui mettrait fin à la séparation et à la finitude. Le discours, ou la réponse de Socrate semble le contredire, mais sert en fait surtout à le compléter. Pour Socrate, et son mentor Diotime, Amour est caractérisé par le dénuement et les expédients. Le dénuement renvoie à la finitude radicale du corps, et les expédients aux tentatives presque pathétiques pour le faire durer toujours plus. Un peu d’eau, un peu de nourriture, une pincée de sommeil, traitement à renouveler continuellement pour maintenir le corps en vie. L’image d’Amour est un mendiant correspondant au corps séparé du faux mythe des origines d’Aristophane.

Loin des arides traités de philosophie purement rationnel, l’amour nous promet un plaisir également physique. Il contente à la fois notre nature finie d’homme et notre nature incomplète et finalisée de mammifère. Nous sommes structurellement faits pour l’accouplement.

Voici une analyse comparative de la production des hormones procurant du plaisir. Aucune activité n’égale, ni de près, ni de loin, l’activité sexuelle. Ce schéma étant généré par ChatGpt, il faut le prendre avec quelques précautions d’usage. Mais la direction générale est assez claire et rarement remise en cause. Le fait que les jeux d’argent soient en deuxième position est assez impressionnant et doit nous apprendre à prendre grand soin de nos économies! Par ailleurs, le graphe semble plutôt orienté sur les hommes que sur les femmes, même s’il n’inclut pas la production de progestérone, l’hormone de la détente qui envahit les hommes après l’éjaculation et qui provoque généralement la période réfractaire.

L’amour et le sexe semblent être la consolation ultime. Ils correspondent à notre nature malheureuse, qui trouve du réconfort dans la consolation amoureuse, à notre nature physique, par la libération d’hormones qu’il provoque, et à notre nature de mammifère, la reproduction de l’espèce étant assurée par ce type de reproduction. Telle est la ruse ultime de la nature: nous avoir fait malheureux pour nous forcer à rechercher le plus haut des plaisirs dans l’accouplement et la perpétuation de l’espèce. La dialectique trouve son origine dans l’ambivalence des forces à l’œuvre dans la nature. C’est ainsi que l’Amour est devenu l’un des modèles du bonheur, du mariage d’amour à la parole de Jésus, un chemin d’union procurant de douces émotions.

L’éveil…ou les éveils

Les 7 sages grecs, dont Solon est réputé être le plus grand, Héraclite et l’impermanence, le sage philosophe et purement rationnel à l’image de Socrate, le sage spinoziste ayant atteint la béatitude, le Bouddha ayant vaincu tout désir, le yogi hindou relié à l’éternité, Jésus et l’amour, le Zen oriental… Nous croulons sous les modèles de sagesse! Lequel choisir? Peut-on réellement arriver à la sagesse ou à l’éveil ? La question est ouverte, mais peut rapidement faire l’objet de quelques ajustements.

La démarche purement rationnelle, le sage pensant perpétuellement, est impossible. Elle ne s’adresse pas à la totalité de l’homme. Elle ne répond pas au corps, ni au cœur. Exit le socratisme. Le sage bouddhiste, qui prétend en finir avec tout désir, est en violation flagrante avec la réalité du désir, la marque même de notre finitude. Il est également profondément nihiliste, sa méditation ultime étant de s’identifier au néant pour désintégrer tout égo. Le sage ne cherchera pas à nier sa nature ou une partie de sa nature. Il doit être complètement sage.

La sagesse du spinozisme

La sagesse doit prendre en charge les émotions et la raison. Etre sage, ce n’est pas être prix Nobel. Ce n’est pas être exceptionnel dans une discipline scientifique. C’est être capable de maîtriser ses émotions et de rester calme et constant en toute circonstance. Le plus difficile à réaliser dans l’acquisition de la sagesse, est le détachement émotionnel.

Si la méthode bouddhiste repose sur le nihilisme, la méthode du yoga hindou est bien plus proche du stoïcisme grecque. Le yoga insiste sur la maîtrise des puissances du corps, à travers la respiration et les exercices de hatta yoga, mais aussi d’ascèse et de méditation. Il s’agit de créer une union spirituelle avec la totalité, par une discipline qui se veut holistique.

L’admiration de la nature

Spinoza reprend une longue tradition qui puise ses racines dans le stoïcisme, et même plus profondément encore chez les présocratiques comme Héraclite. Nous sommes une partie de la nature, dont la force, la puissance et la vie s’expriment à travers les différents types de mouvement que nous voyons dans la totalité de ce qui est. Nous sommes soumis aux mêmes forces, qu’elles suivent les règles de la physique moderne ou des pensées antiques sur le feu, l’air, l’eau et la terre, importe finalement peu. L’essentiel est la continuité de la nature.

Les stoïciens en avaient tirés la doctrine de l’acceptation de tout ce sur quoi nous n’avons pas de pouvoir. A quoi bon se battre, s’opposer à la nature, prétendre que nous n’en faisons pas partie, qu’elle aurait à nous rendre des comptes, ou que nous devrions la soumettre à notre raison? La nature aura nécessairement le dernier mot. « L’homme n’est pas un Empire dans un Empire », énonce Spinoza pour remettre l’homme dans la nature. Amor fati, aime le destin, semble en conclure Nietzsche La Gaya Scienza (§276).

L’admiration et le questionnement devant la beauté et l’organisation de la nature sont la base même, le fondement, la cause, de toute philosophie. Le premier élan de l’âme est celui de l’étonnement devant la nature. Les présocratiques sont ainsi principalement des physiciens, et même si Socrate semble introduire une certaine rupture, en mettant au-devant les thèmes politiques et moraux, Platon reprend la question des lois naturelles dans le Théétète ou le Timée. Spinoza polissait à la main des verres pour les longues vues et les télescopes à une époque d’intense effervescence dans l’observation des planètes. Même s’il n’en fait jamais état, il y a peu de chance qu’il n’est pas été sensible au spectacle de la beauté du ciel étoilé, des croissants de lune, ou à l’émotion d’être parmi les premiers hommes à poser ses yeux sur les satellites de Jupiter. La physique est scientifique, mais elle est également esthétique. Il existe même une preuve de l’existence de dieu basée sur la beauté du monde, la preuve dite physico-téléologique. Il n’est pas possible qu’un monde aussi beau, aussi ordonné, soit dû au hasard.

Nous, modernes, savons que l’univers dans lequel nous vivons est un, issue d’une explosion de matière initiale que nous appelons Big Bang. Nous savons en plus que nous portons en nous la poussière des premiers instants, que nous respirons et buvons le même air et la même eau que Jésus Christ. Nous avons, encore plus que les Grecs ou Spinoza, les preuves formelles que dans notre nature, « Rien ne se perd, rien ne se créer et tout se transforme », pour reprendre la première loi de la chimie de Lavoisier. Nous savons aussi à quel point la vie sur terre et l’existence de l’homme est un miracle parmi les galaxies des galaxies, dans lesquelles nous n’avons pour l’instant toujours pas trouvé la moindre autre forme de vie organique.

L’admiration pour la nature, qui commence pour les Grecs, par l’admiration du soleil, de l’eau des fleuves, de l’air que nous respirons, de la contemplation de la mer et des montagnes, se transforme naturellement en gratitude. Nous avons la chance, parmi toute la création, de contempler ce spectacle et même la chance, par rapport à la grande majorité des générations précédentes de le connaître mille fois mieux. Nous en savons également mille fois plus sur nous-mêmes, sur l’ADN qui nous constitue et qui est radicalement unique. L’homme est toujours jusqu’ici, aussi loin qu’aille ses connaissances, la merveille ultime de la nature.

L’admiration laisse bientôt la place à la gratitude, la chance que nous avons d’être vivant et de pouvoir contempler ce spectacle. Il devient alors possible d’accepter la puissance de la nature et de comprendre ce que veulent dire les stoïciens quand ils nous invite à trouver notre place dans l’ordre cosmique.

Cette méditation sur notre place dans l’univers peut être complétée par une pratique de compassion envers soi-même. Il s’agit simplement de reconnaître notre finitude, nos limites, notre passivité, et de compatir envers nous-mêmes face à toutes ces difficultés qui nous arrivent et contre lesquelles nous ne pouvons rien faire. La nature nous offre, mais elle nous prend. Il n’y a pas de vie s’il n’y a pas de finitude des vivants inclus dans le tout, et nécessairement, nous supportons sans pouvoir y faire grand-chose, la puissance de tout ce qui nous affecte.

L’amour intellectuel de Dieu

A vrai dire, ce n’est pas exactement le chemin intellectuel que nous présente Spinoza dans ses œuvres. Il construit une synthèse assez différente, marquée par la production d’une innovation intellectuelle assez géniale. Spinoza trouve la béatitude dans l’amour intellectuel de Dieu. Il lie l’émotion selon lui la plus puissante et la plus positive, à l’Idée elle-même la plus puissante. C’est cette alliance de l’émotion et de la raison qui rend sa voie vers la sagesse unique. Spinoza s’appuie évidemment sur une longue tradition. Mais les questions étaient généralement séparées, avec d’un côté l’amour de Dieu dans la fois, et de l’autre la maîtrise des passions par la volonté et la raison (nous présentons un résumé rapide des liens entre l’amour et l’idée de Dieu). L’intuition de Spinoza est qu’il faut maîtriser les passions non pas uniquement par une raison décharnée, mais par une manière de cultiver l’émotion la plus positive. C’est ainsi que sa sagesse est plus complète que celle de ses prédécesseurs. L’amour n’est pas charnel, il n’est pas aussi puissant en termes de libération hormonale, mais il peut être plus constant, plus indépendant également. L’esprit peut se penser lié à l’infini par la puissance et l’universalité des raisonnements auxquels il peut atteindre. Mais le corps reste limité, enfermé dans ses petites frontières. Lié l’émotion à la pensée permet de transcender les limites de la finitude.

.La béatitude chez Spinoza

Spinoza a développé une théorie et une pratique de l’amour de dieu, qu’il appelle béatitude. Par la « connaissance du troisième genre », qui est chez lui l’intuition de la totalité de la nature et de dieu, et l’amour de cette totalité, il prétend arriver au plus haut degré de bonheur possible. Spinoza réalise ainsi une triple synthèse, celle du stoïcisme, de l’acceptation de la nature et de la religion de la nature, de la religion chrétienne et de l’amour pour Jésus et pour dieu, et de la pensée et du corps, en liant l’émotion et la raison, dans l’amour intellectuel de Dieu. L’expérience qu’il propose est très proche de la méditation de la gratitude et du bonheur d’être en vie qui peut en découler. Pour Spinoza quand j’aime dieu, je m’aime également moi-même, qui suis une partie de dieu. Il en est de même lorsque nous méditons sur la nature, sur sa beauté et la chance que nous avons de pouvoir vivre pour admirer cette beauté. En reconnaissant notre place dans l’univers, en pensant par exemple que nous portons la poussière des étoiles ou respirons le même air que Socrate et Jésus, comme nous le rappelle l’astronome Niel Tyson, nous prenons plaisir à faire partie de l’univers. L’amour intellectuel de dieu de Spinoza peut sembler très abstrait tant qu’il correspond uniquement à l’Idée intellectuelle de Dieu, avec ses qualités ou propriétés. Mais chez Spinoza Dieu est la Nature, ou la Nature est Dieu. L’amour intellectuel est donc tout aussi bien, et de manière plus sensible, celui de la Nature. Mais tel n’est pas le chemin de Spinoza.

Spinoza reste strictement rationnel et renvoie à l’imagination la question de la beauté. “Le plaisir le plus parfait que nous puissions goûter vient de la contemplation de Dieu en toutes choses, c’est-à-dire de l’ordre et de la beauté de la Nature.” Lettre 32 à Henry Oldenburg (1675). https://hyperspinoza.caute.lautre.net/Lettre-32-Spinoza-a-Oldenburg-20-novembre-1665

Son raisonnement est exprimé dans cette lettre plus que dans tout autre texte. L’âme humaine est une partie de l’entendement divin. Le corps humain est une partie de la nature. Le rapport de l’âme humaine au corps dont elle est l’âme est le même que celui de l’âme du monde, dieu, et la nature tout entière. L’univers est un tout dans lequel toutes les parties se rapportent les unes aux autres, et la connaissance de ces rapports est la connaissance du troisième genre. C’est ce que nous appelons de manière moderne la finalité interne, comme décrite dans la deuxième partie de la Critique de la faculté de juger de Kant. (Kant n’est pas très clair sur le statut scientifique de la causalité circulaire que représente la cause finale. Cette causalité est bien existante dans l’étude des organismes, comme en médecine, et c’est un exemple physique, celui du sang, que prend Spinoza pour illustrer son propos dans la lettre 32).

Y perdons-nous vraiment en liberté? L’amor fati est-il obtenu au prix de la disparition de notre autonomie? Nous reviendrons sur cette question après avoir présenté l’éveil selon la doctrine du yoga.

L’éveil de la Kundalini

Les diverses expériences mystiques nous promettent de trouver l’extase sur terre.. et sans passer par l’acte physique. De nombreuses tentatives spirituelles ont essayé de trouver une expérience intellectuelle proche de l’extase sexuelle. Certains cherchent l’amour de Jésus, et crient leur amour dans la rue. D’autres, soufis, cherchent dans la danse, une ivresse qui va rappeler le pic de l’extase. L’éveil dans le yoga hindou correspond à la mobilisation d’une énergie corporelle, la kundalini.

Pour une description assez complète des chakras: https://www.kinesiologie-marseille.com/tout-savoir-sur-les-chakras-role-et-fonctionnement/ – (parfois le folklore, dont le but est d’enflammer l’imagination, nous entrâine un peu trop loin du but véritable de la pratique)

Le yoga hindou, avant le yoga bouddhiste, a inventé cette technique supposée nous permettre de maîtriser cette énergie, sans doute sexuelle, et de la mettre au service de la divinité, ou de notre liaison avec le divin. La démarche est finalement assez comparable à celle de Spinoza, et est très cohérente dans sa simplicité. La théorie est simple. L’énergie du corps est concentrée dans des points, des carrefours d’organes, de glandes hormonales et de nerfs que sont les chakras. La pensée, la raison, est essentiellement active dans le chakra au-dessus des yeux et du nez. Au sommet du crâne, le chakra le plus important est aussi le point de contrôle du système nerveux parasympathique, celui qui permet de se détendre et d’échapper aux réponses du type fight or fly commandées par le système sympathique. Et tout en bas, entre l’anus et le pénis, mais rien n’est vraiment fixé et localisé avec ce degré de précision, siège le chakra racine, celui de l’énergie sexuelle. L’idée, toute simple en elle-même, est de faire monter l’énergie sexuelle du chakra racine au chakra du sommet du crâne. Une phénoménale quantité d’énergie serait stockée comme assoupie et en puissance au plus profond de nos entrailles.

L’idée physique rejoint tout à fait l’idée intellectuelle. Il s’agit de relier l’énergie du corps et l’énergie de l’âme. Le yoga va encore plus loin que la méthode spinoziste en remplaçant l’émotion par l’énergie. Pour réussir à faire monter la fameuse énergie, le disciple va contracter ses « bandas » et se concentrer sur la montée d’énergie.

Kundalini signifie serpent enroulé. L’énergie serait enroulée trois fois et demie sur elle-même. Il s’agit de l’étirer jusqu’au sommet du crâne. Pour maximiser les chances, le disciple va méditer en même temps qu’il va imaginer la montée de l’énergie. L’idée sous-jacente est que chaque méditation et visualisation vont permettre d’augmenter la production d’énergie, de chaleur et d’hormones bénéfiques. Avons-nous vraiment un serpent dans le corps? Il s’agit évidemment d’une image. La visualisation est une aide à la méditation, un moyen de rendre réel et actif ce qui est imaginé. Le serpent, qui rappelle la corde des fakirs autant que leur compétence de charmeurs de serpent, sert à nous faire comprendre qu’il faut, à la fin de l’exercice, imaginer le flux d’énergie allant du bas jusqu’en haut du corps, sans interruption. Tous les autres exercices de visualisation ont également pour but d’améliorer l’intérocéption, la perception interne du corps.

La pratique peut être stimulée en commençant par une douche froide, pour augmenter la production d’hormones. Certaines théories laissent penser que l’on pourrait faire remonter le sperme lui-même par la colonne vertébrale, pour provoquer un véritable orgasme. Mais la physiologie ne permet normalement pas un tel mécanisme, qui serait en fait impossible. La méthode de l’inversion, ou injaculation, qui permettrait de garder le sperme en soi, ne ferait que le stocker dans la vessie pour expulsion ultérieure. Nous ne pouvons pas entièrement nous faire l’amour à nous-mêmes, et c’est peut-être mieux ainsi, tant le narcissisme est déjà un poison pour l’espèce! Une autre variante propose de réaliser les séances pendant les pics de montée du désir sexuel et serait un moyen d’apprendre à le contrôler. Notons que ces pratiques sont surtout décrites pour des hommes. Il y a quelques textes sur l’organisation du plaisir spécifiquement féminin, mais ils miment la plupart du temps les textes sur le masculin.

Aussi puissante que soit la montée d’hormones, elle ne peut pas égaler la puissance de l’orgasme. Il y a notamment dans l’orgasme un pic, un sommet atteint par l’intensité et la quantité d’hormones produites, qui est inatteignable par d’autres méthodes. L’orgasme inclut également une chute après le pic, notamment chez l’homme, avec la libération de progestérone, qui ne peut pas être mimée par la médiation. Il n’est pas possible de reproduire cette montée brutale et cette redescende tout aussi rapide, typiques de l’orgasme.

L’éveil, le fameux awakening, arrive quand le disciple parvient à réaliser cette conscience de l’énergie circulant de haut en bas du corps, à travers les chakras. L’éveil a un support physique fort. Mais le plus important est la réalisation intellectuelle. En quoi consiste-t-elle? En l’union de l’esprit humain et l’esprit la nature. En la mise à distance de l’égo, de tout ce qui concerne notre vie quotidienne, nos relations avec le monde physique proche, nos parents, nos amis, notre profession, et tous les problèmes liés à tout ceci. L’égo est mis de côté, détaché, remis à sa place à la fois unique et insignifiante vis-à-vis de l’univers. Nous pouvons alors, parce que nous sommes dans la pensée et l’émotion de l’union à la nature, lâcher prise de tous les éléments du quotidien. Le fameux lâcher prise n’est sûrement pas absolu et perpétuel. Nous restons inscrits dans la réalité. Mais la méditation de l’union avec la nature crée un détachement, un éloignement des tracas du quotidien, qui en diminue grandement la puissance et la présence dans la psyché. Les religieux vont plus loin en s’extrayant carrément du monde, en allant vivre dans un monastère, pour ne plus laisser la négativité du monde les atteindre, ou en tout cas, pour les mettre encore plus à distance.

Interprétation de la kundalini

L’éveil de la kundalini est à la fois une technique physique et une image symbolique. Dans l’hindouisme, comme dans le bouddhisme, l’expérience fondamentale est celle de la souffrance (dukkha – Le Yoga-sūtra (II, 15) “ Pour le sage, tout est souffrance ” (sarvaṁ duḥkham vivekinaḥ)). Comme nous l’avons explicité, la souffrance vient de notre nature d’être limité et de la conscience que nous avons de cette limite. Nos limites nous poussent toujours plus loin dans la recherche des satisfactions naturelles, nourriture, soif, sommeil… La conscience de l’injustice métaphysique de ces souffrances est ce qui nous rend fou, ce qui alimente le cheval irrationnel de l’âme décrit par Platon dans le Phèdre. Nous cherchons toujours plus pour compenser la conscience que nous avons de notre misère. Notre désir, qui n’est lui-même que l’envers de nos manques, dépasse alors le simple besoin. La misère et la tristesse universelles engendrent la compassion pour nous et pour les autres. La beauté et l’amour sont les deux plus belles promesses de compensation et de cessation de la souffrance. Alors nous aimons et croyons trouver dans l’amour la rédemption de nos misères. Par une ruse de la nature qui nous fait miroiter l’image de l’union et du bonheur, tout en répondant à la finalité de nos natures de mammifères sexués, nous engendrons de nouveaux humains. Et le cycle de la souffrance recommence.

Le but de l’hindouisme et du bouddhisme est encore à ce niveau le même: faire cesser la souffrance, nous délivrer de dukkha. Mais leurs chemins diffèrent. Le bouddhisme jette le bébé avec l’eau du bain et nous propose de penser notre union avec le néant. L’hindouisme, au contraire, nous propose de nous unir à l’éternité et à la divinité. La kundalini est l’énergie du corps et de l’âme, qui sont généralement orientés vers la satisfaction des besoins et des désirs. Ils sont symboliquement tournés vers la terre, vers l’avoir et le plaisir. Les exercices de yoga consistent à retourner ces énergies vers le ciel et vers Dieu. La conversion philosophique est ici tout aussi bien pratique et physique. Les premiers chakras sont dédiés à la nourriture et à la sexualité. C’est à leur niveau que se situe l’énergie que le yogi apprend à discipliner et à maîtriser. Les chakras représentent symboliquement les grandes fonctions vitales: le sexe, l’appétit, la soif et la digestion, la respiration, etc. Les contrôler, c’est surtout apprendre symboliquement à maîtriser les forces vitales, à ne pas se laisser entraîner par elles dans une satisfaction effrénée, dans la poursuite des plaisirs terrestres, qui seraient finalement très préjudiciables. Comment faire? En reconnaissant et apprivoisant la souffrance, et en dirigeant le désir et l’amour vers la divinité.

Pour faire cesser toute souffrance et tout débordement du désir, il faut s’unir à la totalité de la divinité et du monde. Alors le désir extérieur est inutile. Il n’existe même plus. Telle est la source de tous les exercices d’ascèse du yoga et des autres religions. L’abstinence sexuelle, le jeûne, la privation de sommeil, les voeux de silence, etc, ont tous le même but: nous détourner de la satisfaction terrestre du désir. Nous apprenons à maîtriser le cheval fou. Mais le yoga a cela de plus intéressant qu’il donne une méthode réelle pour y arriver. C’est parce que son illumination est basée sur des exercices physiques qu’il y a toutes ces mises en garde. La kundalini n’a rien de dangereux. Il faut juste pratiquer relativement à jeun, pour éviter les renvois gastriques de l’imagination de l’inversion. Il ne faut pas bloquer la digestion. Et bien sûr, il ne faut pas croire que cela va miraculeusement nous guérir de toutes nos maladies et de toutes nos passions. Maîtriser nos désirs est un travail de longue haleine, qui commence par la reconnaissance et la compassion envers nos propres souffrances.

L’union, même intellectuelle ou imaginaire, avec la divinité provoque une mise à distance de l’égo, de tous les enjeux de la vie quotidienne, qui est presque instantanée. L’énergie dirigée vers le bas est le chemin de l’égo, de l’égoïsme, de la matérialité, et de toutes les passions négatives qui viennent avec. Nous ne sommes sur terre que pour un battement de cils et presque rien n’est en notre pouvoir, que ce soit notre famille, nos amis, ou même notre métier. Pourquoi continuer à s’inquiéter démesurément de toutes ces choses? L’égo n’est plus grand-chose quand nous songeons à notre place dans l’univers. La libération du désir met fin à la reproduction et à la roue des réincarnations. La compensation des souffrances n’est plus à trouver dans les plaisirs terrestres, mais dans la méditation et dans une nouvelle puissance d’action, libérée de la souffrance. Pour l’hindouisme, le vrai soi, par-delà l’égo, le cheval fou, se réalise dans la médiation transcendantale et ouvre la porte au nirvana. Pour le bouddhiste, tout moi est dissous. Pour l’hindouisme, comme pour la sagesse occidentale, il s’agit de se libérer et de devenir plus actif, ce que symbolisent les mantras positifs de la méditation sur la kundalini que nous proposons en annexe. Le double mouvement de l’éveil symbolise le lâcher-prise des souffrances, dans la compassion, et la libération du soi uni à la divinité qui redonne une énergie de création.

Les chakras sont des roues. Ils reproduisent au niveau physique et dans le corps, ce que nous voyons au niveau cosmique et dans la nature. La voûte céleste tourne autour du ciel. Tous les ans, les planètes, les étoiles retrouvent la même place. Sur terre, la vie est rythmée par le cycle des saisons, qui apportent la vie, la mort, la renaissance. L’éternel retour est inscrit, visible dans la nature, avant d’être une théorie de la vie des âmes. Les chakras symbolisent au niveau corporel la roue du destin et de la réincarnation qu’est le Samsara. En apprenant à maîtriser les désirs et les besoins naturels, nous inversons, métaphoriquement, mais aussi réellement, le sens de rotation de la roue du destin. La roue ne tournera plus dans le sens de la terre et de l’attachement, mais dans le sens inverse, de la libération. La maîtrise des chakras permet ainsi de maîtriser le cycle des réincarnations. La roue est aussi le symbole de la répétition, de ces comportements que nous répétons sans même les appercevoir, comme Freud les a mis en évidence. La libération portera, nous sommes tentés de dire, emportera, également cet aspect.

La grande différence avec les religions du livre, du Judaïsme à l’Islam, est que la Bible nous rend responsables de la chute, de notre malheur et de notre condition. C’est parce qu’Eve a goûté le fruit défendu que nous avons été chassés du Paradis et vivons dans la souffrance. Coupable, nous sommes sur terre pour expier. Dans le judaïsme, l’homme est enfermé dans la culpabilité. Il est impossible de suivre les 613 commandements de la Bible. La vie du juif est une vie de martyre perpétuel, sans rédemption, sans au-delà, sans réincarnation. L’homme n’est jamais à la hauteur de Dieu. Jésus a bien tenté de casser ce cycle infernal en prenant sur lui tous les péchés, c’est-à-dire en fait le péché originel; en tentant de l’effacer et de le remplacer par l’Amour de Dieu et des autres hommes. Il a donné de l’espoir, et la religion chrétienne a adouci le châtiment en reprenant l’idée, si ce n’est d’une réincarnation, au moins d’un jugement après la mort et de l’accès à un possible paradis, une forme occidentalisée de la fin des réincarnations. Socrate, quant à lui, reprend quasiment entièrement la doctrine hindoue, même si ses références sont plutôt égyptiennes, notamment dans le Phèdon et dans le mythe d’Er à la fin de la République. Socrate cherche plutôt la raison et à sortir d’un monde d’images et d’illusions intellectuelles que de s’affranchir de la souffrance, mais le résultat est étonnamment le même. L’éveil chez Socrate est le moment de la docte ignorance. Suivant les questions rationnelles et la recherche de la nature d’un sujet, l’interlocuteur de Socrate découvre qu’il ne sait pas de quoi il parle. Il est troublé, choqué comme mordu par une torpille, ou il a l’impression de flotter comme Alcibiade. En même temps qu’il réalise son ignorance, le disciple se déprend de son ego et commence son ascension vers un autre monde, vers un monde intelligible. Socrate, c’est un peu Patanjali, le fondateur de la doctrine hindoue, mais suivant la voix de la raison. Il cherche aussi à dépasser la réincarnation, mais par la vision intellectuelle des idées, par le logos, qui doit en même temps provoquer une purification morale. Le désir se détourne de la matière pour s’élever vers les Idées. C’est ainsi que, plus que tout autre, Socrate a fait de la raison, de la lumière naturelle, quelque chose de sacré. C’est le miracle grec.

Le serpent, la concupiscence, l’abstience

La kundalini est décrite comme un serpent. La plupart du temps, le serpent est endormi, en puissance. Les exercices de yoga sont là pour le réveiller. Mais peut-être qu’il se réveille également de lui-même.

Il est frappant de voir que l’image du serpent apparaît dans le yoga de la maîtrise des désirs, comme il apparaît dans la Bible. Même si les deux cultures sont très éloignées, il est possible que la langue symbolique soit universelle. C’est la thèse que défend Fromm dans Le langage oublié. Le serpent serait dans les deux cas le symbole du désir sexuel. La montée de la kundalini serait uniquement la capacité à ne pas céder au désir sexuel et à laisser sa puissance s’exprimer dans le corps. La Kundalini, lovée, entourée sur elle-même et se déployant pour se dresser, rappelle assez clairement l’érection du pénis. Mais cette fois, c’est en interne que le désir doit monter. C’est avec le dieu qu’il faut s’unir. La non-reproduction, ou simplement le pouvoir de pas céder au plaisir, serait une clé de la non-réincarnation. Maîtriser ce désir serait la clé de la maîtrise de tous les autres désirs, tout simplement parce que c’est le plus puissant de tous. Il ne faut pas mentir ou se faire passer pour un faux vertueux, cet exercice est particulièrement difficile. Ce pourquoi sans doute, il y a réellement si peu de témoins pour faire part de leur expérience en la matière.

Bon courage jeune padawan!

Et la vie terrestre, que devient-elle?

L’objection majeure et réelle que nous pouvons faire à l’éveil, est de savoir ce que nous devons et pouvons en faire une fois revenus sur terre. Même si nous réalisons l’éveil, la conscience de notre appartenance à l’univers, nous ne pouvons pas rester 24h/24h 7j/7j dans cet état mental. Même si nous réalisons l’éveil plus occidentale dans l’amour intellectuel de Dieu, ou dans la raison et la rationalité, nous ne pouvons pas penser 24h/24h 7j/7j. Il y a une vie, dont nous devons satisfaire les contingences.

Que faire? C’est ce que nous verrons dans la deuxième partie de cette étude.

Annexes

  • Une rapide histoire de l’amour intellectuel de Dieu
  • Quelques extraits de la lettre 32 de Spinoza, sur la connaissance intuitive du troisième genre
  • Une description de la méthode pour faire monter la kundalini, et quelques autres informations:
    • Description de la méthode et des chakras
    • A-t-on des preuves physiologiques? En résumé, rien de bien concret
    • Peut-on vraiment faire remonter le sperme par la colonne vertébrale pour donner de l’énergie à tout le corps? Non pas du tout…
    • Comment la maîtrise des chakras permet-elle de maîtriser les puissances du corps? Rien n’est automatique.
  • Une méditation sur la compassion envers soi-même.
    • Trop souvent notre culture est dans la négation de la reconnaissance de la souffrance, qu’elle soit métaphysique ou bien réelle. Nous sommes trop dans la dénonciation de celui qui se plaint, qui se pose en victime (avec laquelle nous entrons en concurrence pour obtenir l’attention) et pas assez dans la reconnaissance de la douleur. Nous devons réapprendre à nous consoler, et cela commence par la prise en compte de notre douleur, avant même, ou en même temps, que nous prenons en compte celle d’autrui.

L’amour et l’idée de Dieu

Très belle question, qui touche à un point délicat de l’histoire de la philosophie : le lien entre affect (passio, emotio, amor) et idée (ratio, conceptus) avant Spinoza.

Chez les Anciens

  • Platon
    • Dans le Banquet et le Phèdre, il articule l’amour (éros) avec l’idée du Beau et du Bien.
    • L’amour est ici un moteur spirituel : il pousse l’âme à s’élever de l’attirance sensible vers la contemplation de l’Idée divine.
    • Ce n’est pas encore « amor Dei », mais c’est déjà le mariage d’un affect (éros) avec une idée transcendante.
  • Aristote
    • Dans l’Éthique à Nicomaque, Dieu est « pensée de la pensée » (noêsis noêseôs), et les sages cherchent à l’imiter.
    • Ce n’est pas formulé en termes d’amour, mais de désir intellectuel (orexis), qui a une coloration affective.
  • Stoïciens
    • Ils n’utilisent pas l’« amour » à proprement parler, mais parlent d’adhésion joyeuse à la Raison universelle (logos).
    • Marc Aurèle exprime une forme de sérénité affective vis-à-vis du destin, proche de ce que Spinoza reprendra dans l’« amour intellectuel de Dieu ».

Chez les Néoplatoniciens

  • Plotin (Ennéades)
    • L’âme s’élève vers l’Un dans un mouvement qui est à la fois connaissance et amour.
    • L’union mystique avec le divin est décrite comme une expérience où la pensée et l’émotion ne sont pas séparées.

Tradition chrétienne

  • Saint Augustin (IVe-Ve siècle)
    • Développe une doctrine de l’amor Dei : aimer Dieu est la fin ultime de l’âme.
    • Mais chez lui, l’amour de Dieu est à la fois une affection et une illumination intellectuelle (Dieu comme Vérité).
    • Formule célèbre : « Fecisti nos ad te et inquietum est cor nostrum donec requiescat in te » (Confessions I, 1).
    • Ici déjà, amour et idée de Dieu sont unis, mais dans un cadre religieux.
  • Thomas d’Aquin (XIIIe siècle)
    • L’amour de Dieu (amor Dei) est étudié comme vertu théologale (charité), distincte de la simple connaissance de Dieu.
    • L’intellect et la volonté (siège de l’amour) sont deux facultés, mais l’amour vient par la connaissance de Dieu → articulation explicite entre idée et amour.
  • Dante, dans la Divine Comédie, nous rappelle que le principe de Jésus est l’Amour. Dante traverse Enfers Purgatoire et Paradis pour retrouver Béatrice. Le poème se termine [spoiler] par la fusion dans la lumière de l’amour
  • Le Livre du Graal, dont s’inspireront Chrétien de Troyes et tant d’autres, est écrit en France vers 1215 et 1235 ( et oui, rien d’anglais là-dedans….). Seul le chevalier ayant l’amour le plus pur et le plus détaché de l’amour physique pourra retrouver le Graal.
  • Mystiques médiévaux (Maître Eckhart, saint Bernard de Clairvaux)
    • Développent un langage où l’union à Dieu passe par un amour intellectuel, souvent décrit comme une fusion affective et cognitive.

Juste avant Spinoza

  • Giordano Bruno (XVIe siècle)
    • Fait de l’amour une force cosmique qui unit l’âme à l’infini divin.
    • Dans ses dialogues (De gli eroici furori), l’amour intellectuel élève l’âme vers l’infini : on est très proche de Spinoza.
  • Descartes (XVIIe siècle, Les Passions de l’âme)
    • Décrit l’amour de Dieu comme une passion pouvant être purifiée et gouvernée par l’intellect.
    • Mais l’union entre idée claire et affect reste chez lui séparée : l’esprit connaît Dieu, la volonté l’aime.

Conclusion

Avant Spinoza, plusieurs traditions avaient associé amour et idée de Dieu :

  • Platon (éros vers l’Idée),
  • Plotin (élan d’union de l’âme à l’Un),
  • Augustin et Thomas (amor Dei lié à la connaissance),
  • Bruno (amour héroïque de l’infini),
  • Descartes (passion ordonnée vers Dieu).

Mais Spinoza innove radicalement : chez lui, l’amor Dei intellectualis (l’amour intellectuel de Dieu) n’est pas une passion ni un commandement religieux, mais la conséquence nécessaire d’une idée adéquate. Autrement dit, l’émotion (joie) est directement produite par l’idée vraie de Dieu — unification inédite du plan affectif et du plan intellectuel.

Spinoza, lettre 32 – extrait

Cette lettre constitue sans doute, avec quelques passages du Court traité, la meilleure description de la connaissance du troisième genre.

Vous me demandez mon opinion sur la façon dont nous pouvons connaître comment chaque partie de la nature s’accorde avec son tout et en quelle manière elle se rattache aux autres parties. Je pense qu’il s’agit des raisons qui persuadent de cet accord et de cette liaison. Je vous l’ai dit en effet dans ma précédente lettre, pour ce qui est de savoir absolument en quelle manière les choses se lient les unes aux autres et s’accordent avec leur tout, je n’ai pas cette science ; elle requerrait la connaissance de la nature entière et de toutes ses parties. Je m’applique en conséquence à montrer quelle raison m’oblige à affirmer que cet accord et cette liaison existent. Toutefois je veux au préalable faire voir que je n’attache à la nature ni beauté, ni laideur, ni ordre, ni confusion. Les choses ne peuvent être dites en effet belles ou laides, ordonnées ou confuses que par rapport à notre imagination.

Par cohésion donc des parties j’entends simplement que les lois ou la nature de chaque partie s’ajustent de telle façon aux lois de la nature d’une autre qu’il ne peut y avoir de contrariété entre elles. Pour le rapport du tout et des parties je considère les choses comme parties d’un certain tout, toutes les fois que leur nature s’ajuste à celle des autres parties, de façon qu’il y ait autant que possible accord entre elles. Toutes les fois en revanche que les choses ne s’ajustent pas les unes aux autres, chacune d’elles forme dans notre esprit une idée distincte et doit être en conséquence considérée comme un tout, non comme une partie. Par exemple en tant que les mouvements des particules de la lymphe, du chyle, etc. s’ajustent les uns aux autres, de telle sorte qu’il y ait entre ces particules accord et qu’elles forment un même liquide qui est le sang, la lymphe, le chyle, etc. seront considérés comme des parties du sang. Mais en tant que nous concevons les particules de la lymphe comme ne s’ajustant pas, eu égard à leur figure et à leur mouvement, aux particules de chyle, nous les considérons comme un tout et non comme une partie.

Imaginons, si vous voulez, un ver vivant dans le sang, supposons-le capable de distinguer par la vue les particules du sang, de la lymphe, etc. et de calculer comment chaque particule venant à en rencontrer une autre ou bien est repoussée, ou bien lui communique une partie de son mouvement, etc. Ce ver, vivant dans le sang comme nous vivons dans une certaine partie de l’univers, considérerait chaque partie du sang comme un tout, non comme une partie, et ne pourrait savoir comment toutes ces parties sont sous la domination d’une seule et même nature, celle du sang, et obligées de s’ajuster les unes aux autres suivant que l’exige cette nature pour qu’entre leur mouvement s’établisse un rapport leur permettant de s’accorder. Si, en effet, nous imaginons qu’il n’y a point de causes extérieures au sang, qui puissent leur communiquer de nouveaux mouvements, et qu’il n’y a point d’espace au-delà, ni d’autres corps auxquels les particules du sang puissent transmettre leur mouvement, il est certain que le sang restera toujours dans le même état, que ses particules ne subiront point de variations autres que celles qui se peuvent concevoir par la seule nature du sang, c’est-à-dire par un certain rapport que soutiennent les mouvements de la lymphe, du chyle, etc., et dans ces conditions le sang devrait être toujours considéré comme un tout, non comme une partie. Mais il y a un grand nombre d’autres causes dans la dépendance desquelles se trouve la nature du sang, et qui à leur tour dépendent du sang, d’où suit que d’autres mouvements et d’autres variations se produisent qui n’ont pas pour origine unique les rapports que soutiennent les mouvements de ses parties, mais aussi les rapports du mouvement du sang avec les causes extérieures et réciproquement. Le sang cesse alors d’être un tout et devient une partie. Voilà ce que j’ai à dire sur le tout et la partie.

Nous pouvons et devons concevoir tous les corps de la nature en même manière que nous venons de concevoir le sang ; tous en effet sont entourés d’autres corps qui agissent sur eux et sur lesquels ils agissent tous, de façon, par cette réciprocité d’action, qu’un mode déterminé d’existence et d’action leur soit imposé à tous, le mouvement et le repos soutenant dans l’univers entier un rapport constant. De là cette conséquence que tout corps, en tant qu’il subit une modification, doit être considéré comme une partie de l’Univers, comme s’accordant avec un tout et comme lié aux autres parties. Et comme la nature de l’Univers n’est pas limitée ainsi que l’est celle du sang, mais absolument infinie, ses parties subissent d’une infinité de manières la domination qu’exerce sur elles une puissance infinie et subissent des variations à l’infini. Mais je conçois l’unité de substance comme établissant une liaison encore plus étroite de chacune des parties avec son tout. Car, ainsi que je vous l’écrivais dans ma première lettre, alors que j’habitais encore Rijnsburg, je me suis appliqué à démontrer qu’il découle de la nature infinie de la substance que chacune des parties appartient à la nature de la substance corporelle et ne peut sans elle exister ni être conçue.

Vous voyez ainsi pour quelle raison et en quelle manière le corps humain est à mon sens une partie de la nature.

Pour ce qui est de l’âme humaine, je crois aussi qu’elle est une partie de la nature : je crois en effet qu’il y a dans la nature une puissance infinie de penser et que cette puissance contient objectivement, dans son infinité, la nature tout entière, les pensées particulières qu’elle forme s’enchaînant en même manière que les parties de la nature qui est l’objet dont elle est l’idée.

Je considère en outre l’âme humaine comme étant cette même puissance de penser, non en tant qu’elle est infinie et perçoit la nature entière, mais en tant qu’elle perçoit seulement une chose finie qui est le corps humain : l’âme humaine est ainsi conçue par moi comme une partie de l’entendement infini.

Je ne puis cependant ici expliquer et démontrer de façon rigoureuse toute cette doctrine et ses conséquences, cela serait trop long et je ne pense pas que vous l’attendiez de moi en ce moment. 

La technique du yoga de l’éveil

La Kundalini, techniques des Upanishads

La doctrine hindoue est formalisée dans les Védas, qui auraient été écrits à partir de -1500, et feraient suite à une longue tradition orale. Ce serait la plus ancienne tradition religieuse toujours en activité. Moïse, dont personne n’a jamais trouvé la moindre trace réelle, aurait vécu autour de -1400. L’Avesta, dont est issu le Zoroastrisme, daterait de -1200 et pourrait remonter à -1500. Zoroastre lui-même aurait vécu autour de -600, à peu près au même moment que Bouddha. Seule le polythéisme égyptien, qui serait né au 4ème millénaire avant notre ère, et dont nous arrivons à retracer l’histoire en plongeant dans la préhistoire, serait plus ancien.

Les Upanishads forment la dernière partie des Vedas, en formant la conclusion et le dépassement, et dateraient de -800 à -600. L’Upanishad consacré à la kundalini est la quatre-vingt-sixième Upanishad du canon Muktika. Elle appartient au Krishna Yajur Véda et est classée comme Upanishad du Yoga. Mais selon certains, ce texte serait bien plus tardif et pourrait ne remonter qu’au XIVe siècle. Quoiqu’il en soit, l’Upanishad contient la description canonique de la méthode de l’éveil de la kundalini, don nous reprenons les grandes lignes ci-dessous.

Quelles pensées, idées ou émotions méditer pendant l’exercice physique, spécifiquement dans la pratique du yoga hindou visant à l’éveil et à la montée de la kundalinī.

Dans la tradition tantrique et yogique, on ne fait pas « juste » un exercice physique : chaque mouvement, chaque souffle est porté par une intention intérieure.

Il n’est pas besoin de localiser extrêmement précisément les chackras. Nous les sentirons parfois plus à fleur de peau sur la face, parfois plus à l’intérieur. (Certains recommandent de les sentir dans la colonnes vertébrale, mais nous la sensation interne n’a pas beaucoup de prise sur les os, dépourvus de chair et de terminaisons nerveuses)

De même, il n’est pas nécessaire du tout de se mettre en lotus pendant des heures… surtout que nous sommes nombreux à ne pas pouvoir tenir cette posture, qui demande une souplesse et peut-être mettre une configuration particulière du bassin. Alors pas d’inquiétude, l’essentiel est dans le développement de la conscience intérieure. Idem pour les exercices de respiration, ils ne servent pas tant que ça, même s’ils sont bons pour la santé! L’essentiel est d’être calme et concentré en soi.

1️⃣ Au niveau du chakra racine (Mūlādhāra)

  • Le chakra racine est associé à la faim et à la nourriture, à la sécurité et à l’instinct de survie.
  • C’est principalement ici qu’est l’énergie qu’il s’agit de faire remonter dans le kundalini
  • Il est situé entre l’anus et le sexe, un peu au-dessus de ces organes et à l’intérieur du corps. Il est parfois recommandé de méditer sur le triangle énergétique de ces trois pôles. On peut tout à fait méditer sur toute la zone.
  • Émotion : sécurité, confiance, sentiment d’être soutenu par la Terre.
  • Pensée : « Je suis ancré, je suis en vie, je fais partie de la nature. »
  • Visualisation : un serpent endormi, enroulé trois fois et demi, qui s’éveille doucement.

2️⃣ Au niveau du chakra sacré (Svādhiṣṭhāna)

  • Ce chakra est associé à l’énergie (désir, pulsion) sexuelle, mais aussi aux relations émotionnelles avec les autres.
  • Il intervient après la nourriture, qui est plus nécessaire, et il est donc plus « facile » en théorie à maîtriser
  • Il est situé entre le sexe et le nombril. On le localise parfois trois doigt sous le nombril. Il n’est pas toujours évident à distinguer du premier chakra, et cela n’a pas une grande importance
  • Émotion : ouverture au plaisir de l’existence, créativité fluide.
  • Pensée : « Je m’autorise à ressentir et à créer. »
  • Visualisation : un flot d’eau pure qui commence à monter.

3️⃣ Au niveau du plexus solaire (Maṇipūra)

  • Ce chakra est lié à la digestion, à l’énergie de l’action de tous les jours, à la transformation
  • Ce chackra est situé juste en-dessous des cotes, parfois entre les cotes et le nombril. Cette zone sans chackra est très obscure pour la conscience et c’est elle qui est travaillée par les bandas et par les barratements, pour tenter de lui apporter un peu de conscience.
  • Émotion : force intérieure, confiance en soi, pouvoir personnel.
  • Pensée : « J’ai la puissance de transformer ma vie. »
  • Visualisation : un feu qui s’embrase et pousse l’énergie vers le haut.

4️⃣ Au niveau du cœur (Anāhata)

  • On peut tout à fait se concentrer sur ce chackra et sur le coeur en même temps, d’autant que les exercices sur la prise de conscience du coeur et notamment la tentative de prise de conscience du mouvement du sang dans les veines et artères, est un des exercices canons du yoga. Le coeur est légèrement à gauche et le chackra reste au centre, soi au même niveau, soit légèrement au-dessus du coeur.
  • Émotion : amour, compassion, gratitude, acceptation.
  • Pensée : « J’aime et je suis aimé. Je suis en union avec tout ce qui vit. »
  • Visualisation : une lumière verte ou dorée qui s’expanse à chaque inspiration.

5️⃣ Au niveau de la gorge (Viśuddha)

  • Ce chackra est juste sous la pomme d’Adam, dans le creux de la gorge. Il forme lui aussi un système avec les autres points d’énergie que sont la langue, et le fond de la gorge, derrière les végétations.
  • : vérité, sincérité, pureté.
  • Pensée : « Je dis ma vérité, je chante la vie. »
  • Visualisation : un son intérieur (OM) qui vibre et purifie le canal.

6️⃣ Au niveau du troisième œil (Ājñā)

  • Le troisième oeil est situé sur le front au-dessus des deux yeux réels. Il est l’endroit de la lumière blanche, de la clarté de l’esprit. Il n’est pas sur le chemin de la montée de l’énergie vitale de la kundalini. Il est plutôt mis au repos lors de cette méditation, ce qui lui permet de retrouver sa clarté originaire.
  • Émotion : clarté, vision, intuition.
  • Pensée : « Je vois la réalité telle qu’elle est. »
  • Visualisation : une lumière indigo qui s’ouvre comme un lotus.

7️⃣ Au niveau du sommet de la tête (Sahasrāra)

  • Le sommet du crâne correspond presque au point physiquement le plus haut du crâne. Il est juste avant, vers la colonne. C’est sur ce point que se pratique la posture sur la tête.
  • C’est là qu’arrive la kundalini et là que se fait la connexion avec le cosmos. C’est par là que s’évacue tout l’excès de désir et de souffrance, dans le plaisir de la connexion à l’infini et à la divinité. C’est ainsi que s’effectue le lâcher prise de l’égo, qui est la souffrance et la recherche de la compensation de la souffrance
  • Émotion : union, paix absolue, extase spirituelle.
  • Pensée : « Je suis Un avec le Tout. »
  • Visualisation : une flamme blanche ou violette qui s’élève et se dissout dans l’infini.

En résumé

  • Chaque chakra franchi correspond à une émotion, pensée et image intérieure.
  • L’exercice physique (āsana, respiration, contraction des bandha) sert de canal physique, et la pensée/émotion sert de canal mental.
  • C’est la fusion des deux (corps + pensée) qui permet de guider la kundalinī dans son ascension.

Peut-on vraiment sentir la montée de la kundalini?

Ta question touche un sujet à la fois spirituel, physiologique et symbolique : la kundalinī. Traditionnellement, dans le yoga tantrique et dans certaines écoles de méditation, on dit que cette énergie « dormante » est lovée à la base de la colonne vertébrale et qu’elle peut s’éveiller et « monter » à travers les chakras.

Sensations physiques souvent décrites

Les témoignages varient beaucoup, mais on retrouve certains motifs récurrents :

  • Chaleur ou feu intérieur : sensation de chaleur intense montant le long de la colonne vertébrale.
  • Fourmillements, vibrations : picotements dans le dos, la nuque, ou au sommet de la tête.
  • Mouvements spontanés (kriyas) : secousses, balancements, gestes non intentionnels du corps.
  • Pression ou expansion : au niveau du front (troisième œil), du cœur, ou du sommet de la tête.
  • Altérations de la respiration : souffle plus lent, plus profond, parfois suspendu naturellement.
  • Sensations sexuelles transmutées : énergie vitale ressentie dans le bassin qui semble se transformer en élévation de conscience.

Expériences subjectives associées

En parallèle des sensations physiques, les pratiquants décrivent :

  • État de lucidité accrue ou de clarté mentale inhabituelle.
  • Sentiment d’unité ou de dissolution des frontières du moi.
  • Montée d’émotions intenses (extase, paix profonde, parfois peur ou tristesse).
  • Vision symbolique : couleurs, lumières, impressions de sons subtils.

Comment savoir si c’est « réussi » ?

Il n’existe pas de critère médical objectif. Dans les traditions spirituelles, on considère qu’on « a fait monter l’énergie » non seulement par les phénomènes physiques, mais surtout si :

  • il y a transformation durable : plus de clarté, de compassion, de stabilité intérieure,
  • les chakras semblent activés : ouverture progressive, sensation de circulation énergétique,
  • la vie quotidienne est touchée : moins de réactivité, plus de présence.

À l’inverse, si l’expérience reste uniquement une série de sensations fortes mais sans effet durable, les maîtres disent que ce n’est pas encore une véritable « ascension de kundalinī » mais une activation énergétique locale.

Comment la maîtrise des chakras permet-elle de maîtriser les pulsions?

Tu touches à une tension entre deux registres différents : la physiologie (où la faim est ressentie dans la bouche, la langue, l’estomac, via des signaux hormonaux et nerveux) et la symbolique énergétique (où le yoga et les traditions ésotériques associent les appétits vitaux aux chakras).

Physiologiquement : où se ressent la faim

  • La faim résulte de la sécrétion d’hormones comme la ghréline (produite dans l’estomac), et se manifeste dans tout le corps.
  • Le goût et l’anticipation du plaisir alimentaire sont ressentis dans la bouche et la langue (papilles gustatives, salivation).
  • La sensation de vide ou de contraction se situe plutôt dans l’estomac.

Dans la symbolique des chakras

  • Le chakra racine (Mūlādhāra) est lié à la survie, aux besoins fondamentaux : manger, dormir, se protéger.
  • Quand ce centre est en déséquilibre, il peut se traduire par une compulsion alimentaire (trop manger par peur de manquer) ou, à l’inverse, une insécurité qui coupe l’appétit.
  • Comme chez Aristote, dans l’Ethique à Nicomaque, la pulsion, le cheval fou, est caractérisé par le défaut ou l’excès par rapport à un équilibre médian
  • Méditer sur le chakra racine, travailler son ancrage (respiration, postures d’équilibre, visualisation d’une base solide) aide à stabiliser le rapport aux besoins corporels.

Comment cela aide à maîtriser l’appétit

  • La méditation sur le chakra racine ne supprime pas directement les signaux physiologiques de faim (langue, bouche, estomac).
  • En revanche, elle agit sur la dimension psychique de l’appétit :
    • Réduire l’anxiété et l’insécurité qui poussent à manger plus que nécessaire.
    • Amener une conscience accrue du lien entre faim réelle (physiologique) et désir de manger (émotionnel).
    • Développer un sentiment de sécurité intérieure, qui permet de ne pas réagir compulsivement à chaque sensation de bouche ou d’estomac.

En résumé :
La faim se ressent effectivement dans la bouche et le système digestif. Mais la pratique méditative sur le chakra racine ne vise pas à couper ce signal biologique : elle aide à transformer le rapport psychologique au besoin, en diminuant l’anxiété et en apportant une stabilité intérieure. Ce qui permet de distinguer plus clairement entre faim physiologique et appétit conditionné, et ainsi de mieux réguler la nourriture.

Veux-tu que je te propose un petit protocole pratique (méditation courte + exercice respiratoire) centré sur le chakra racine pour travailler spécifiquement la régulation de l’appétit ?

Mythe buster: impossible de faire remonter le sperme par la colonne vertébrale

Origine de cette idée

  • Dans certains textes du Haṭha-Yoga et du Tantrisme (comme la Haṭha Yoga Pradīpikā ou la Śiva Saṁhitā), on trouve l’idée de retenir le sperme (bindu en sanskrit) et de le « faire remonter » pour nourrir le cerveau et éveiller la conscience.
  • On associe cette pratique à des techniques comme le brahmacarya (continence sexuelle), le vajroli mudrā (contrôle du flux génital) ou encore les bandha (contractions énergétiques).
  • Symboliquement, c’est la transmutation de l’énergie sexuelle brute en énergie spirituelle.

Que disent les textes ?

  • Les textes parlent de la montée de l’amṛta (nectar d’immortalité), de l’ojas (énergie vitale sublimée) ou du bindu.
  • Ils décrivent un mouvement subtil, non pas de matière biologique, mais d’énergie vitale (prāṇa).
  • Le sperme ou le fluide vital est considéré comme l’expression matérielle de l’énergie vitale : l’empêcher de se dissiper revient à garder cette énergie disponible pour l’ascension de la Kundalinī.

Sur le plan biologique

  • Non, il n’est pas possible que le sperme remonte physiquement par la colonne vertébrale : anatomiquement, c’est impossible.
  • Mais certaines pratiques (musculaires, respiratoires, méditatives) peuvent donner la sensation énergétique d’un courant montant le long de la colonne, souvent décrit comme chaud, lumineux ou serpentin.
  • Ce ressenti est interprété symboliquement comme la remontée du sperme transformé en énergie spirituelle.

Comment comprendre cela aujourd’hui

  • Symbolique : « Faire remonter le sperme » signifie sublimer l’énergie sexuelle (qui a une grande puissance créative) pour l’utiliser dans la méditation, l’intuition, la conscience élargie.
  • Pratique : respiration, bandha, méditation sur les chakras, éventuellement chasteté ou modération sexuelle.
  • Effet vécu : augmentation de vitalité, clarté mentale, expériences intérieures profondes.

Donc :

  • Physiologiquement : impossible que le sperme remonte dans la colonne.
  • Énergétiquement et symboliquement : oui, il est possible de transformer l’énergie sexuelle en énergie de conscience, et c’est cela que les maîtres de kundalinī yoga veulent dire.

Méditation : Compassion pour ce que je n’ai pas choisi

  1. Entrer dans le silence
    Ferme les yeux. Sens ton souffle. Laisse venir à toi l’évidence : je suis là, vivant, et pourtant traversé par tant de choses que je n’ai pas choisies.
  2. Évoquer ce qui m’échappe
    Laisse remonter, doucement, sans chercher à tout embrasser :les blessures infligées par les autres,les pertes irréparables,les injustices subies,les limites de ton corps et de ton temps, et les souffrances, la souffrance qui va avec et parcours mon corps et mon esprit.
  3. Reconnais que tout cela existe, que tu n’y es pour rien.
  4. Nommer la victime innocente
    Dis intérieurement :
    « Il y a en moi quelqu’un qui a reçu des coups qu’il n’a pas mérités. »
    « Il y a en moi une victime de la vie, exposée, fragile, finie. » Ne cherche pas à relativiser. Donne toute sa dignité à cette vérité. La souffrance est consubstancielle à la vie. Il n’y a pas vie sans finitude, sans différence entre les êtres, sans limitation en chaque être. Nous sommes passifs en tant de choses!
  5. Un regard de tendresse
    Imagine-toi regardant cette part de toi, comme tu regarderais un enfant blessé par la dureté du monde.
    Laisse venir de la douceur, non pas pour effacer, mais pour entourer. Dis-toi :
    « Je vois ta peine. »
    « Je sais que tu as souffert sans l’avoir voulu. »
    « Et je suis avec toi. Je te fais un câlin, je te prends dans mes bras ».
  6. Respirer avec la finitude
    À chaque inspiration, accueille ce fait : je suis fini, limité, vulnérable.
    À chaque expiration, offre un soupir de compassion à cette condition humaine partagée.
  7. Ma souffrance est unique et je suis là pour y être attentif, l’écouter, et le consoler
  8. Clore
    Reviens à toi. Ressens ton corps, ton souffle.
    Dis doucement :
    « Je me donne le droit d’avoir souffert. »
    « Je me donne le droit d’être en compassion avec moi-même. » Reste un instant dans ce geste d’alliance avec toi-même, avant de rouvrir les yeux.

C’est une méditation de reconnaissance et d’hospitalité : tu accueilles en toi la victime malmenée par la vie, et tu lui donnes une place, de la tendresse, de la dignité.

Ceci n’est qu’un exemple, à chaque nouvelle méditation, idéalement le matin au réveil et juste avant de dormir, les mots peuvent varier pour s’adapter au plus proche des circonstances et à l’humeur.

3 commentaires

Laisser un commentaire