On a déjà tout dit sur le conflit en cours, tout sauf l’essentiel. Comme d’habitude.
De nombreux commentateurs hésitent à franchir le pas, comme si l’émotion, le droit de se défendre, le droit de vivre et le droit d’avoir un Etat était suffisant pour supporter et justifier une demi-barbarie. Comme si le nouveau sommet atteint dans l’horreur par les terroristes du Hamas donnait d’une certaine manière à Israël le « droit » de franchir à son tour les frontières de la dignité humaine
Il n’en est rien. C’est le propre du salaud que de justifier ses actes en montrant l’exemple de l’injustice des autres. Le sage n’est guidé que par l’idée de justice et la loi morale. Il vaut mieux selon la devise Socratique, « subir l’injustice que la commettre », ce qui signifie tout simplement qu’il faut toujours rester juste, même devant l’injustice. Ce n’est pas en s’en prenant à la population palestinienne tout entière, ce qui signifierait la transformer en allié objectif du Hamas, qu’Israël pourra construire la paix.
C’est, tout à l’inverse, en montrant qu’elle est encore capable du jugement de Salomon et de séparer le bon grain de l’ivraie, de ne poursuivre que les coupables, de chercher à libérer les otages et de commencer à libérer du Hamas les palestiniens eux-mêmes, qu’Israël pourra également s’en libérer.
Joe Biden, quoiqu’on pense de son âge, est décidément un très grand politique. Il a immédiatement mis en garde Israël. Les Etats-Unis, qui ont réagi au 11 septembre en attaquant l’Irak qui n’avait strictement rien à voir avec les attentats, a déstabilisé le monde entier. Ce renversement de la planète, dont nous subissons encore les conséquences, ne vient pas seulement du déclenchement de la guerre, mais bien d’avoir déclenché une guerre injuste et d’avoir ainsi renié ses propres principes de justice et de paix. Là est peut-être bien la racine de maladie qui gangrène la plus grande démocratie au monde. Israël, instruite de l’erreur américaine, doit se comporter exactement à l’inverse.
Il faut réarmer le pays, défendre les frontières, pourchasser uniquement les responsables du Hamas. Et c’est tout ! Protégée à nouveau, Israël doit immédiatement faire son auto-critique, se débarrasser enfin de Netanyahou, mettre la bride courte à l’extrême-droite orthodoxe. Le danger mortel pour la survie d’Israël, ce ne sont pas les musulmans, c’est elle-même. Si Israël devient un Etat religieux terroriste, les Démocraties occidentales lui tourneront le dos…et Israël disparaîtra.
L’exemple de Gandhi, la non-violence, la magnanimité d’un peuple qui serait capable de dire : « toi palestinien, tu m’as attaqué, mais tu ne sais pas que tu es manipulé et moi, coupable aussi d’avoir laissé ce cancer se développer chez toi comme chez moi, je vais maintenant m’employer à en libérer nos deux peuples ». Une nation capable de s’exprimer ainsi, serait un peuple qui montrerait au monde l’inutilité des armes, et honorerait la mémoire de toutes les victimes des terroristes, non pas par la vengeance et la loi du talion, mais en s’engageant de toutes ses forces dans la construction de la paix.

Le respect des Commandements
Israël serait aussi à la hauteur de ses propres lois, en commençant par la première d’entre-elle: « Tu ne tueras point ». Le commandement ne signifie évidemment pas que l’on doive renoncer à se défendre, mais que l’assassinat, le meurtre en dehors de toute loi, est interdit. « C’est péché » comme disent les juifs. Israël violant ses commandements sait pertinemment à quoi s’attendre. La Bible le dit bien à maintes reprises : c’est le châtiment de Dieu qui s’abattra une nouvelle fois sur le peuple « élu », pour ne pas avoir été, une fois de plus, à la hauteur de la parole divine. « Tu ne convoiteras rien de ce qui est à ton prochain« , dixième commandement, parce que la terre appartient à tous, et que les palestiniens ont aussi droit à une terre, à un Etat, à la vie, et le droit de se défendre contre l’agresseur. Tu ne porteras pas de témoignage mensonger contre ton prochain, et tu n’accuseras pas sans preuve qui que ce soit, fusse-t-il celui que tu crois être ton pire ennemi.

Toute attaque contre les palestiniens portera toujours la suspicion d’avoir été faire pour réduire la puissance de Gaza et reprendre bientôt la colonisation. Le temps de la colonisation est définitivement révolu, pour la Russie en Ukraine, comme pour Israël en territoire palestinien. Toute tentative de défendre l’idée que les palestiniens sont les complices du Hamas scellera la fin pour des décennies de toute tentative de dialogue avec ses propres voisins. Il faut en finir avec les faux semblants, les fausses négociations et les manipulations en tout genre. Qui a alimenté la bête ? Qui a largement légitimé et accepté le développement du Hamas, laissant la politique politicienne la rendre aveugle à l’immonde réalité qui grandissait à ses portes ? Qui a assassiné le meilleur de ses dirigeants, Yitzhak Rabin? Un terroriste religieux juif. Il faut en finir avec les faux coupables, ce qui revient toujours d’ailleurs à légitimer et laisser en paix les vrais salauds, en l’occurrence les Mollahs iraniens.
Israël détient aujourd’hui dans ses mains meurtries, non pas uniquement sa propre survie, mais la possibilité d’une paix entre l’Occident et l’Islam. La vraie bataille est celle des valeurs. Il faut ébranler les coeurs durcis par des générations de haine. Seule la justice, la magnanimité, le respect dû à ses propres morts et à la vie de tous ceux qui ne sont pas ses ennemis pourra réaliser cet exploit. Les Dix Commandements, lègue du peuple juif à l’humanité, sont largement suffisants pour y arriver, pour peu qu’on le veuille, pour peu que l’on se rappelle qu’être juif c’est obéir à loi de Moïse. Voilà ce qui nous paraît, aujourd’hui plus que jamais, digne de nos prières.

Appendice:
Le discours de clôture de la visite de Joe Biden en Israël le 19/10/2023
Cet article complète un triptyque sur le conflit Hamas Israël, dont les deux autres sont ici:
L’universalisme n’est pas un relativisme
Musulmans du monde entier, révoltez-vous contre le terrorisme islamique!
Non à la conquête de Gaza
Nous sommes le 6 mai 2025. Partout sur les réseaux, les fils juifs cherchent à préparer les esprits à l’invasion de Gaza. Il n’est peut-être plus possible de faire marche arrière. Mais il ne faut pas pour autant se mentir sur la réalité des faits et la violation des valeurs.
Je n’irai pas par quatre chemins. Aujourd’hui, je pense à ma grand-mère, à ceux qui sont morts dans les camps et ceux qui ont survécu. Ils n’auraient jamais accepté cela. Cette solution est une honte pour Israël. C’est la preuve que rien n’a été appris de la Shoah par le peuple juif. Comment dans ce cas, faire comprendre la leçon de la Shoah au monde ?
Conquérir Gaza, alors qu’Israël a laissé se développer le Hamas pendant une décennie, c’est un comble de cynisme. Cela ne sera compris par personne et va créer pour les juifs 100 ans de haine. Évidemment, au sein de la communauté, comme dans toute communauté, la critique est interdite. La triste vérité est que les juifs voulant la solution à deux Etats sont minoritaires depuis longtemps. La génération des déportés et survivants était d’une dignité que l’on ne retrouve plus aujourd’hui dans aucune classe sociale. Sa descendance, malheureusement, a porté à sa manière le poids de la Shoah, sans faire son introspection. Elle a opéré un retour au religieux qui désespérait une partie de leurs parents. Elle s’est gargarisée de son esprit communautaire. Et la communauté, c’est le refus et la haine de l’autre, ici comme ailleurs.
Il n’y a peut-être plus aucune solution. On ne peut pas vivre encerclé par l’Iran. Ce n’est pas une raison pour perdre, justement, la raison, et jeter un voile terrible sur l’avenir de ce peuple si peu nombreux.